Mon conseil à l’ami Aloysius

Deux matchs, c’est tout ce qu’une rumeur enflante octroie à Aloysius Paulus Maria van Gaal pour redresser la barre à Manchester United. Un temps qui parait bien limité comparé à l’année et demi passée aux commandes des Red Devils par celui qui se fait heureusement appelé Louis van Gaal. Sous ses airs austères, celui qu’on préjuge souvent comme un tyran de vestiaire, un militaire enclin à interchanger ses joueurs de positions dans un système ultra-rigide, tel un cuisiner fantaisiste qui s’estime au-dessus des codes de la gastronomie classique, a montré à plusieurs reprises qu’il était avant tout un passionné de football galvanisé par l’institution qui l’abrite. Rappelons-nous de son speech éméché lors du Manchester United’s Player of the Year Award, témoin de la flamme ardente qui brûle en son sein de connaisseur du football. Et le respect qu’il y avait alors déféré à Wayne Rooney. Un respect si grand qu’il en devient sans doute nuisible, si le passé de footballer devient la seule justification à une place attitré au sein d’un onze d’une équipe de football devant, à chaque rencontre, être la plus performante possible.

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« Ce que je veux devant moi? Le but adverse. »

Ce pourrait bien être l’histoire d’un pied de nez à un préjugé. J’aime les préjugés, un amour qui se conjugue au like, un I like un peu malsain, jouissant de ne pas tomber dedans, car, contrairement, à la potion magique de Panoramix, tombé dans leur marmite ne rend pas plus fort ; à moins qu’être dans le rang ne soit une force. La grande image d’Épinal collant à la peau – flottant au vent – du pélican le moins oisif de la planète Terre est son autoritarisme froid, sa faculté à se faire honnir de ses joueurs pour l’être humain qu’il sait être en contexte professionnel. Pourtant, depuis qu’il est arrivé en Angleterre, Louis van Gaal s’évertue presque à démontrer le contraire : conférences de presse empathiques, moments chaleureux, franc-parler quasi-surhumain pour la profession, Louis van Gaal semble être, soit changé, soit victime d’un quiproquo initial, d’une erreur de jugement, dont je ne chercherai pas les causes plus ou moins discernables dans cet exercice de conseiller anazelytique. Non, Louis van Gaal n’est définitivement pas un monstre égocentrique, au contraire, c’est un être passionnel et qui tire de cette énergie originellement incontrôlée, par un retournement contradictoire interne, ce flux rationnel qui comme fulmine de ses oreilles, qui bordent un front en héliport. Là encore, une illustration s’impose : acerbe l’an dernier face aux commentaires footballo-moralistes de Sam Allardyce, défait avec West Ham, plus rapide que son ombre et, sans lâcher la moindre gouttelette de sueur, il dégaine, un dossier agrafé sur les plans tactiques de son Manchester United. La fiéreté d’aimer son travail, de l’aimer d’amour love, canalisé tant bien que mal par sa raison : Aloysius dégueule de contradictions internes, voilà qui est – sans condescendance aucune – des plus touchants. Cette émotion est celle qui m’a donné envie de lui consacrer une lettre ouverte, y exprimant mes suggestions les plus interdites, ce qui reste pour moi bien plus aisé à rédiger, vous allez lire, que pour lui, à même penser.

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Scène d’affection entre Aloysius et Christopher

On va pas tortiller autour du pot : mon conseil à Aloysius est un conseil de l’urgence ; il ne s’agit donc pas de remettre en question les grandes orientations tactiques prises depuis sa prise de fonction, que ni je ne caricaturerais, ni ne pourrais me passer de critiquer dans le contexte de son effectif et du football moderne dans sa globalité – mais ça n’est pas cette hauteur critique que j’ai choisie. Ainsi, opter tout à coup pour un jeu plus direct, moins dominant dans la possession du ballon, serait un coup de poker au sens péjoratif du terme : ce serait pour partie remettre son sort entre les mains du hasard, incarné en plus dans ce cas par Jack Butland et Thibaut Courtois, deux des gardiens les plus efficaces du championnat en situation de duel. Louis van Gaal a une meilleure main que ça, qu’il abatte ces meilleures cartes. Aïe, je tortille, là. Le conseil, le conseil… Wayne Rooney ! Avant-centre. C’est non, stop. Wayne Rooney ne doit plus jouer à ce poste. Wayne Rooney n’est plus un avant-centre de qualité première. Et il n’est pas la meilleure option disponible dans l’effectif des Red Devils à ce poste. Roi-neey de pique est devenu Way-let de cœur. Allez, étayons.

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« À carreaux, madame ! »

Wayne Rooney n’est pas en déclin, il ne s’agit pas d’être alarmiste. Par contre, il serait hypocrite de ne pas ajouter à la transformation (l’âge de Wazza avançant) de son jeu, une détérioration notable de certaines des caractéristiques du diabolique attaquant ; celles-ci impliquent une remise en question de sa fonction d’attaquant. Wayne Rooney a-t-il encore vocation à évoluer si haut sur le terrain, au regard de ses capacités actuelles ? En outre, si Rooney ne court plus aussi vite au meilleur de ses sprints, ne démarre plus aussi fort en partant à l’arrêt, si ses enchaînements dans la surface ne sont plus si violemment cliniques malgré le peu d’espace-temps dont il dispose, il a développé, amélioré certaines autres de ses compétences, qui justifieraient d’autant plus son repositionnement plus bas sur le terrain: vision du jeu, déplacement défensif, maturité générale (perfectible, still) et surtout jeu de passes – longues ou courtes, quelque soit la surface de pied, et même les plus inventives, ailes de pigeon ou autres, il a étalé malgré peu d’occasions d’assist l’ampleur de sa palette. Si la vitesse d’exécution n’est plus là, les gestuelles puent toujours autant la qualité la plus absolue. Par ailleurs, Wayne Rooney semble jouer avec scepticisme sur son propre positionnement, comme doutant qu’il soit son meilleur, d’une façon ou d’une autre ; ce qui ne fait qu’empirer les effets de son effilochement physique. Le football est un sport où les prises de décision doivent être rapides, assurées: celles de Rooney sont teintées de doute, hésitantes, arrachées – quand ses dispositions nouvelles lui laisse encore le temps d’en prendre. C’est d’ailleurs cruellement cocasse de voir son faciès changer lorsqu’il est placé au milieu de terrain, ce qui remonte aux récentes saisons passées, étant donné l’acharnement à le faire jouer attaquant en cette saison 2015-2016 : l’épais trentenaire aux implants semble à la fois conscient d’y être plus à son aise mais aussi hanté par une nostalgie tracassante de ses merveilleuses années passées plus haut sur le terrain. Pourtant, Wayne Rooney va devoir s’y résoudre.

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Napolouis

Attaquant, ça n’est plus pour lui. Combien de fois les déplacements de Rooney ont paru défaillants, non pas dans l’intention, mais dans la réalisation de ceux-ci ? On ne peut plus les dénombrer, tant il n’a plus la capacité physique d’antan. Naguère, Rooney était à la fois le plus endurant et le plus explosif, capable d’en faire trop, taclant et débordant, centrant et scorant, comme un fantasme du footballer moderne, capable de tout et incapable de rien. Sauf de se réinventer, le corps ne suivant plus ; du moins l’est-il pour le moment, incapable de cela. Et c’est là aussi que doit se voir la contribution d’un entraineur. Wenger, quoiqu’on en dise, a su trouver de nouveaux rôles et postes à bien des joueurs, en adéquation entre leurs capacités, les besoins d’une équipe donnée et les dispositions psychologiques de ceux-ci. Notre cher Aloysius, auquel s’adresse ce conseil, aura su le faire par le passé, et j’ai confiance qu’il sache le faire à l’avenir. Exercice d’équilibriste, car chaque joueur n’a pas les mêmes goûts en plus de tous différer par leurs aptitudes, comme on le voit avec Rooney, qui aura bien du mal à faire le deuil de sa carrière d’avant-centre. Sauf que ce que ne réalise peut-être pas encore complétement Rooney, c’est qu’il est au crépuscule de sa carrière de joueur, précisément celle d’attaquant. Se replacer au cœur du jeu, ce serait pour lui renaitre, en faisant fi de toute nostalgie. L’intérêt est total, la prise de risque moindre, par-dessus le marché. Car Aloysius, pendant ce temps, galère avec son double-pivot et est à la recherche d’un joueur rythmeur au milieu de terrain, qui ait les capacités physiques pour jouer chaque semaine ou presque. Un joueur complet et capable de trancher au centre du terrain, par son jeu long mais aussi sa qualité balle au pied, la conservation du ballon face au pressing, une certaine forme de vivacité dont un Rooney, même déclinant physiquement, dispose. Surtout comparé aux alternatives Schweinsteiger et Carrick, qui sont d’autres cas de joueurs en difficultés soit physique (pour l’Anglais) soit culturello-tactico-physique (à propos de quoi j’invite nos lecteurs à rédiger un conseil à l’ami Aloysius en commentaire).

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Pélicance

Alors voici ma suggestion. Ouvre bien grand tes yeux, Aloysius, tu as deux matchs pour mettre ça en place, pour une fois t’as quand même du monde de fit, pas d’excuse sur ce plan-là. Même Phil Jones traîne sa bidoche sur les prés, en ce mois de décembre, franchement, c’est un putain de miracle. Bon. Les 5 de derrière, gardien compris, j’te fais confiance, tant que tu me mets pas Varela et Borthwick-Jackson. Par contre, dans le double-pivot tu m’associes Rooney avec Schneiderlin, puis au-dessus tu mets Herrera en attacking midfielder. Quant à l’attaque ? Idem, c’est toi qui voit. On sait que t’apprécies Mata, son activité avec ou sans ballon en phase offensive, sa capacité à créer presqu’ex nihilo lors des interminables phases de possession des Red Devils, à l’aide de son harpon de pied gauche. Admettons. Avant-centre, je te laisse même le choix entre Fellaini et Martial. Mais soyons honnêtes, tu nous laisses le Belge sur le banc, et tu sais bien que si t’as besoin d’un but de raccroc dans les 10 dernières minutes contre Stoke, tu seras bien content de disposer du salaud le plus chevelu de l’histoire pour t’aider à la tâche, comme face à Bruges ou lors de l’incident avec Big Sam, qui aurait préféré, en terme de chevelu, Marouane à Andy, faut être clair. Idem sur l’autre aile, la gauche, je te donne tout mon crédit. Du moment que la salle des machines est bien huilée, autour du trio Rooney – Herrera – Schneiderlin, Depay ou Lingard auront moins de responsabilités, et donc moins de difficultés, à briller – alors fais ton choix propre. Depuis août, on le remarque de la plus frappante des manières: les ailiers gauches de van Gaal font partie des finishers ; ce qui ferait d’un Martial ailier gauche avec Fellaini avant-centre un coup tactique pas si dégueulasse pour ces 2 matchs à couteaux tirés. Du moment que le milieu de terrain Wayne Rooney ne soit plus amené à devoir évoluer avant-centre sans pouvoir l’assumer ne serait-ce que physiquement, et qu’il puisse remédier aux problèmes fondamentaux d’United autant par son absence aux avant-postes que par sa présence au cœur du jeu. Peut-être que certains de mes confrères auront, alors, enfin la chance de chanter, haut et fort, la louange d’Ander Herrera.

From Real Madrid to Sussex : Jack Harper

L’Ecosse vous va si bien. C’est sûrement ce que Jack Harper se dit maintenant qu’il s’est rapproché de la terre natale de ses parents. Pourtant, le natif de Malaga n’a pas vraiment la carrière du joueur typique écossais. Alors qu’il vient de signer pour Brighton (Championship) nous vous proposons de découvrir le parcours de ce jeune joueur qui aspire à « jouer la Coupe du Monde avec l’Ecosse ».

Brighton sign Real Madrid striker : non, nous ne sommes pas dans Football Manager. Jack Harper a 19 ans et vient d’achever sa formation jeune. Le monde professionnel lui tend les bras et les médias écossais attendent déjà beaucoup de lui. A y réfléchir, quoi de plus normal pour ce jeune joueur qui a fait toutes ses gammes dans la prestigieuse formation du Real Madrid. Il arrive au club en 2009 et passe par toutes les catégories. Cette année, il a disputé la Ligue des Champions U19 avec ce qui est maintenant son ancien club.

Mais comment un écossais peut-il arriver au Real Madrid ? Quel lien peut-il y avoir entre les deux parties ? Aucun, mis à part ses parents, tous les deux écossais. Il a également deux frères qui partagent la même passion que Jack : le football. Son frère ainé a connu l’Ecosse puisqu’il avait 7 ans lorsque les Harper arrivèrent sur la Costa Del Sol. Jack et Mac, son plus jeune frère, sont donc nés outre-manche.

Jack débute le football dans le club de la ville où lui et sa famille vivent, Fuengirola. A 13 ans, plusieurs clubs le suivent déjà et alors qu’il est proche du FC Seville, c’est finalement le Real Madrid qui l’endosse pour ne plus le lâcher, jusqu’à cet été. Précisons qu’à la base, ce n’était que pour un contrat d’un an et que, jusqu’en 2012, il ne lui était proposé que des contrats de 2 ans. Cette même année 2012, il avait signé un contrat de 5 ans, le liant au club jusqu’à ses 21 ans.

Coaché successivement par Morientes et Zidane, ainsi que camarade d’Enzo Zidane dans les différentes équipes de jeunes, il a eu la chance de disputer la Youth Champions League, comme nous l’avons mentionné précédemment. Lors du premier match, contre le FC Bale, le Real s’impose 2-0, sur un doublé d’Harper, dont une bicyclette acrobatique. Au total, il a inscrit 3 buts et décerné 2 passes décisives.

La fierté nationale du sentiment « écossais »       

Jack Harper avec les U19 de l'Ecosse  Crédits: Daily Record
Jack Harper avec les U19 de l’Ecosse
Crédits: Daily Record

L’Espagne et l’Ecosse : deux pays diamétralement opposés notamment sur le football. S’il est né en Espagne, il assure se sentir « plus écossais » et il affiche clairement sa volonté de jouer avec l’équipe nationale d’Ecosse. « Je veux réussir avec l’Ecosse, jouer pour mon pays et que ma famille soit fière de moi ».

Depuis l’installation il y a 20 ans de la famille Harper en Espagne, ils ne sont jamais retournés vivre en Ecosse. Tracy, sa mère et John, son père, sont très optimistes pour la carrière de leur fils : « Jack a quitté la maison à 13 ans pour être éduqué et guidé par le Real Madrid. A cet âge là vous ne savez pas ce qui peut se passer pour votre développement. Aujourd’hui, il a prouvé qu’il pouvait avoir sa place en équipe première ».

Un temps de jeu régulier pourrait permettre à Harper d’accrocher une place pour les échéances futures avec l’Ecosse, à condition que le pays se qualifie pour une phase finale – ce qui n’a plus été le cas depuis 1998. L’Euro 2016 et la Coupe du Monde 2018 sont deux objectifs que Jack garde en tête.

Avec le pays de ses origines, il a déjà joué avec toutes les catégories dès les U15 et plus récemment, il a fait partie du groupe des U19. « Ce serait incroyable de pouvoir jouer pour l’Ecosse, le rêve de ma vie serait de disputer une Coupe du monde avec mon pays ».

Au Real Madrid, chez les entraineurs qui ont eu Harper sous leur responsabilité, on dit du milieu offensif qu’il a une excellente vision du jeu et qu’il peut, à tout moment, « surprendre et détruire les défenses ». C’est également ce qu’en pense Mark Wotte, l’équivalent du Directeur Technique National de la SFA, la Fédération de football écossaise. Wotte est venu voir Harper plusieurs fois lorsqu’il était en Espagne. Et le joueur de confier : « les différentes visites de Mark m’ont prouvé à quel point il s’intéressait à moi, cela m’a rassuré, et conforté dans mon choix de jouer pour l’Ecosse ». Pour Wotte, « Harper est à une période fondamentale de sa carrière. Entre 18 et 20 ans, beaucoup de choses se décident. Il ne faut pas faire d’erreur ». Ses parents, la fédération écossaise et le pays en lui-même semblent servir de cadre au joueur.

La saison qui vient de s’achever était la dernière pour Jack Harper en tant que « youth » (jeune) et son départ pour Brighton coïncide probablement avec la volonté pour lui de se lancer. La proximité certaine du club avec l’Ecosse, va sans doute faciliter ses visites régulières à Glasgow pour y voir de la famille, ce qu’il faisait jusqu’ici tous les ans.

Chris Hughton, l’entraineur de Brighton où Harper vient de signer pour 2 ans, assure qu’après s’être remis de sa blessure au genou, le joueur va devoir saisir toutes les occasions qu’on lui donne pour jouer en équipe première. C’est également Hughton qui a convaincu le joueur de venir à Brighton, alors que ce dernier avait d’autres offres venant de plus haut, de la Premier League. En définitive, Harper s’est vu proposer un contrat avec l’équipe B du Real Madrid et ainsi de pouvoir partir en prêt une année. Il a choisi de partir définitivement, pour d’une certaine manière pouvoir voler de ses propres ailes.

En quittant l’Espagne et son club de cœur, le Real Madrid, il prend un risque : celui de se lancer dans l’inconnu. Mais en restant au Real, le joueur prenait le risque de ne jamais voir sa carrière exploser, d’être trimballé de prêt en prêt et de ne peut-être jamais franchir la barrière de l’équipe première madrilène.

La route est encore longue et le chemin très certainement semé d’embûches mais à l’avenir, il serait peut-être judicieux de garder le nom de Jack Harper en tête.

André Ayew & Swansea : les raisons d’une union

Jeudi 11 Juin 2015, le site de Swansea City Football Club dévoilait au grand nombre ce qui était devenu soit un secret de polichinelle, soit une épée de Damoclès : André Ayew signe chez les Swans. Dans le premier des deux cas, l’observateur du marché des transferts de la Premier League montrera quelques réserves et un certain degré d’incompréhension face à un tel choix. Les médias sportifs, français ou non, avares en données footballistiques, donnent volontiers les chiffres des futurs émoluments du fils d’Abédi Ayew, dit Abédi Pelé : le verdict tombe, la guillotine tranche, ça y est, un club moyen de Premier League surpasse financièrement le 4ème de Ligue 1. C’est sur ces chiffres que rebondiront les plus furieux supporters marseillais, voire des suiveurs franco-français, soucieux de l’équité financière dans le football professionnel européen. Il ne s’agira pas ici de dénoncer la paresse compréhensible de ces dits-médias, qui donnent à la majeure partie de leurs lecteurs ce dont ils ont envie, mais d’exposer les raisons qui sous-tendent – et non justifient – la ratification d’un tel contrat. Le transfert d’André Ayew à Swansea n’est-il que l’histoire de gros sous d’un joueur voulant à tout prix rejoindre la Premier League ?

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André Ayew veut prendre exemple sur Didier Drogba, mais en quel sens?

Quelles raisons derrière le choix d’André Ayew ? Quand les médias surévaluent la puissance financière de Swansea…

Pour mieux comprendre l’engagement d’André Ayew pour le club Gallois, il faut revenir deux jours auparavant. Le mardi 9 Juin. Ce jour-là, c’est Slaven Bilic qui est annoncé par la direction de West Ham : il devient le nouvel entraîneur de West Ham, il devra diriger les Hammers pour leur dernière saison à Boleyn Ground avant le déménagement au stade olympique. Nous sommes alors au plus fort de la rumeur André Ayew, à la croisée des chemins : l’un menant à Swansea, l’autre à Londres, dans l’est plus précisément, au district de Newham. C’est cette nomination qui, vraisemblablement, impactera directement le choix d’André Ayew : Bilic, dans l’hypothèse, aurait apposé son veto dans le transfert du Ghanéen, alors que celui-ci était tout proche de s’engage avec West Ham, le club est-londonien proposant 100,000£/semaine. Une proposition sur laquelle ne peuvent s’aligner les Swans, qui paient Sigurdsson 33k£/s, ou qui payaient Bony 50£k/s. Le salary cap respecté au club était de 35k£/s en 2013. Ce qu’ont proposé les Hammers à A. Ayew, c’est ce que Bony touche désormais dans son nouveau club. C’est alors que le joueur qui aura joué, en cumulé, 7 ans pour l’OM en séniors, n’a plus d’autres choix en Premier League que de signer pour les Swans. Ce qu’il fait. Un choix financièrement bien moins intéressant, puisque son salaire y sera, selon le Telegraph, de 60k£/s. Quasiment équivalent à celui qu’il touchait à Marseille, et surtout une sorte de record pour le club. Alors, quels avantages avait-il à signer à Swansea, s’il n’en tire aucun économiquement ? (bien qu’on puisse douter qu’il aurait été prolongé à Marseille à une même hauteur de salaires, étant donné les difficultés financières de l’OM, mis en garde récemment par la DNCG)

Ayew signe à Swansea2

Pour ce qui est de West Ham et de leur nouvel entraineur, l’ex-sélectionneur de la Croatie, Slaven Bilic, les emplettes devraient toujours se faire du côté de Marseille. Cependant, le coach Croate préfère à André Ayew des profils moins versatiles tactiquement, en les personnes d’André-Pierre Gignac et Dimitri Payet. Swansea n’a pas battu, ce qui aurait en fait été irréaliste, les Hammers, dans cette course pour convaincre le joueur, mais ceux-ci ont déclaré forfait, leur nouvel entraîneur avortant les pourparlers. Retournons à notre cas André Ayew, pourquoi venir à Swansea n’est pas un choix nécessairement par défaut, même si à l’échelle de la Premier League cela y ressemble ?

… et sous-évaluent l’attractivité de la Premier League…

Pour André Ayew, les raisons de devenir un des Swans sont aussi diverses que variées. Comme il a pu le répéter, comme l’eau à la bouche, lors de la conférence de presse suivant sa présentation, le joueur voulait venir en Premier League et c’est de cette volonté qu’est venue sa signature à Swansea. En Premier League, il retrouvera un championnat supérieur à celui de la Ligue 1, et ce pas uniquement d’un point de vue sportif. Si comparer culturellement ou sportivement Série A, Bundesliga, Liga et Premier League peut s’avérer être un exercice d’équilibriste souvent perpétué par des suiveurs boutiquiers ou sur-spécialisés dans un de ces championnats, il est indéniable aujourd’hui que la Ligue 1 est, à minima, un cran en-deçà sportivement parlant de la Premier League. Et même en dehors du contexte sportif, dans lequel André Ayew se retrouvera mieux (joueur collectif, polyvalent, versatile, sans vrai défaut) que dans celui où il a travaillé à Marseille (même si sa versatilité était aussi un avantage en Ligue 1, tandis qu’un joueur technique mais unilatéral souffre en Ligue 1), il a soigné ses performances pour pouvoir rejoindre un championnat plus intense, plus spectaculaire, mais surtout plus compétitif. Il aurait également pu choisir, à ce titre, des championnats très différents, comme ceux d’Allemagne, d’Espagne ou d’Italie. Il s’y serait également plu sportivement, étant donné l’adaptabilité d’André Ayew, à la fois petit et au bon jeu de tête, technique et trapu, fin et battant, dribbleur et tacleur. Que ne sait-il pas faire ? N’importe quel technicien rêve de disposer de ce genre de joueurs, le côté humain mis à part, sur lequel nous ne pouvons dire grand-chose de certain : si André Ayew a toujours montré sur le terrain un comportement exemplaire et fait même preuve d’un certain charisme, son rôle dans le vestiaire marseillais face aux méthodes d’entrainement originales de Bielsa n’était pas clair. Sur le terrain, il aura toujours donné satisfaction, soucieux qu’il est de son avenir. Par ailleurs, André Ayew est né en France, à Seclin près de Lille où jouait alors son père. Il fut formé en France, à l’OM. Ce qui nous ramène au soi-disant rêve légitime de tout joueur formé par un club Français : la Premier League. Si ses origines ghanéennes, un pays anglophone, peuvent avoir une influence dans son choix de carrière, c’est surtout l’influence d’un milieu et même d’un agent, qui touchera 2M£ de prime à la signature, qui a du s’exercer dans ledit rêve d’Angleterre d’André Ayew : il y a une émulation positive autour du foot anglais en France, qui fait fantasmer les joueurs français. Si André Ayew joue pour l’équipe du Ghana, il est né en France et y a grandi. Il est donc culturellement très rattaché à la France.

C'est au Rayo Vallecano que Kakuta vient de réussir la meilleure saison de sa carrière
C’est au Rayo Vallecano que Kakuta vient de réussir la meilleure saison de sa carrière

En outre, si André Ayew pourrait aller dans les autres championnats majeurs et n’y va pas, ça n’est pas parce que « le jeu » y est moins bon en Italie, Espagne ou Allemagne : c’est tout simplement impossible à déterminer, si ce n’est faux. Ces pays ont moins d’argent à distribuer, et les clubs espagnols de « bas de haut de tableau » préfère former pour revendre, car ils n’ont pas – encore, l’Espagne tendant à s’aligner sur le système de redistribution des droits TV Anglais – les moyens de signer, même gratuit, un André Ayew pour 4 saisons. Les agents, qui toucheront moins de primes, sont moins friands de ce genre de signature, même si sportivement cela peut-être parfois plus souhaitable, à l’exemple d’un Kakuta épanoui au Rayo. L’Allemagne, elle, propose pourtant un championnat sportivement équivalent, et même culturellement peut-être plus spectaculaire. Les stades, plus grands, y sont tout aussi pleins. Les publics sans aucun doute plus bruyants. Pour l’Italie, André Ayew fut un temps annoncé vivement à la Roma de Rudi Garcia. Il y aurait joué la Ligue des Champions mais aussi s’y serait frotté à une plus grande concurrence. Et ça n’est pas ce qu’il voulait : ce qu’il voulait, c’était la Premier League. Ayew a côtoyé tant de joueurs français, qui eux-mêmes sont influencés par leurs agents prompts à rediriger leurs joueurs vers les prés soigneusement entretenus de Villa Park, Carrow Road ou White Hart Lane. Cependant, André Ayew a au moins un mérite. Il a choisi Swansea, et va donc trouver un club très structuré, qui ne gâche pas la fameuse manne financière, toujours plus grande, que la machinerie Premier League lui octroie depuis 4 saison maintenant.

… où des clubs comme Swansea se font une place intermédiaire

À Swansea, comme à Southampton ou Stoke, depuis maintenant 3 saisons, chacune d’elle est l’occasion d’une stabilisation toujours plus grande. Qui passe par, soit une absence de régression, c’est-à-dire une régularité dans le milieu de tableau de la Premier League, soit par une progression, même minime. En 2013, les Swans remportaient la League Cup. L’année suivante, Bony les rejoignait pour une campagne européenne qui les fatigue. Les Swans, à l’instar de Stoke, finaliste déchu de la FA Cup en 2011, bouclent difficilement le championnat mais parviennent à assurer leur maintien en PL assez aisément. Un passage obligé mais ardu pour ces deux clubs, que ne connaitront pas les Saints l’an prochain. L’Europa League rapporte toujours trop peu, malgré une augmentation des rémunérations, ne vaut toujours pas le détour financièrement parlant à court terme. Remporter le trophée après avoir passer chaque tour rapporte à peu près autant qu’une simple qualification à la phase de poules de Ligue des Champions. Cela ne compense pas les efforts consentis.

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Monk, tueur en série?

Swansea a, lors du dernier exercice, le premier sous le joug de Garry Monk, ex-joueur Swans pour les 10 dernières années de sa carrière, battu le record de points du club en Premier League. Malgré le départ durant le mercato hivernale de Wilfried Bony. Une soustraction amortie par un effectif de qualité. Une qualité supérieure à celle, par exemple, de celui de l’Olympique de Marseille. Sigurdsson, Ki, Shelvey, Routledge, Ashley Williams, Neil Taylor, Fabianski. Autant de joueurs qui ont joué une grande majorité des matchs comme titulaires. D’autres aussi. Mais ceux-là sont performants et sûrs. Jonjo Shelvey est pourtant un joueur fou, capable de marquer des 25 mètres avec aisance comme d’offrir des balles de but à l’adversaire avec nonchalance. Ses absences, son caractère passionné, qu’il traine avec flegme en ferait un joueur instable dans beaucoup de clubs. Mais à Swansea, il est mis dans des dispositions à la fois exigeantes mais tranquilles, où un crâne déchevelé par une trop grande anxiété dans ses jeunes années peut tendre à s’épanouir. Un club sans trop de pression où le sérieux règne, et où le joueur progresse : Swansea est la réponse inverse au cliché des Hull, Newcastle et autres images d’Épinal du club de la perfide Albion ou se perdent nos moyen-bons de la Ligue 1.

Il y a un exemple qui doit inspirer la confiance à André Ayew : celui de Wilfried Bony. L’Ivoirien y a acquis les lettres qui firent que Manchester City se penchèrent sur lui. Certes, choisir Manchester City n’est pas forcément un accomplissement sportif, tant leur politique mercantile est discutable. Mais le club a fini 2nd cette saison et Bony a trouvé place dans la rotation, à défaut de devenir titulaire. Son salaire est doublé depuis Swansea et il a obtenu aux Pays de Galles ce qu’il n’aurait pas pu obtenir directement via son précédent club encore : le Vitesse Arnhem ; un strapontin, une fenêtre d’exposition, l’occasion aussi de se frotter à un championnat plus compétitif et intense, bref une véritable amélioration sportive, financière, culturelle, médiatique. Les dirigeants Citizens ont fini d’être convaincu par le joueur grâce aux preuves qu’il a faites en Premier League avec Swansea. C’est sans aucun doute le genre de parcours qui inspirent André Ayew et les personnes susceptibles de le conseiller. Sous les projecteurs de la PL, face aux big ones, il pourra faire ses preuves de façon différente que depuis le championnat de France. Il n’avait et n’aurait même plus eu les projecteurs de la Ligue des Champions sur lui, avec l’OM. Il a besoin de ce deal avec Swansea, ou West Ham. Si West Ham proposait plus d’argent, ce qui aurait été plus confortable dans un projet sportif plus flou, c’est à Swansea, où il gagnera autant d’argent mais s’inscrira dans un projet sportif plus ambitieux. Quel rôle pourra lui incomber, dès lors, dans ce-dit projet des Swans ? Après avoir parler de stratégie de carrière et de gros sous, ce dont nous ne pouvons nous priver si nous voulons réellement comprendre les mécanismes de prises de décision d’un joueur dans le cadre de sa carrière.

EINDHOVEN, NETHERLANDS - NOVEMBER 25:  Wilfried Bony of Vitesse shoots on goal during the Eredivisie match between PSV Eindhoven and Vitesse Arnhem at Philips Stadion on November 25, 2012 in Eindhoven, Netherlands.  (Photo by Dean Mouhtaropoulos/Getty Images)

Pour quelles raisons Swansea a jeté son dévolu sur André Ayew ? Swansea & André Ayew : une relation gagnant-gagnant…

André Ayew arrivait en fin de contrat à Marseille. Son arrivée à Swansea est parfaitement indépendante de toute indemnité de transferts. Selon le Telegraph, toujours, son agent aura touché 2M£ de prime à la signature. C’est donc le seul frais additif au salaire qu’auront déboursé les dirigeants de Swansea pour André Ayew. Ils récupèrent un joueur de 25 ans, avide de grimper les échelons, qui arrive enfin dans le championnat dans lequel il désirait le plus évoluer. Si Ayew a signé à Swansea, c’est que les clubs plus hauts au classement ne sont pas encore convaincus de posséder le joueur dans leur effectif, ce dont le joueur se fera un plaisir de leur prouver le contraire. Il est désormais sous leur nez, il jouera chaque équipe deux fois dans la saison et pourra démontrer qu’il mérite peut-être mieux que Swansea. Pour le club Gallois, c’est absolument bénéfique, étant donné qu’ils ont récupéré gratuitement un joueur ambitieux. Celui-ci sera de toutes façons amené à être performant et à assumer son salaire. Mais signer 4 ans de contrat, c’est l’assurance, si le joueur assume, de revendre à bon prix ! Pas d’indemnités d’achat, possibilité de récupérer des millions. Le salaire-record n’est alors qu’une futilité. André Ayew a donc signé pour 4 ans moins pour le projet à long terme que pour le court terme : performer, et vite, pour pouvoir, comme Bony, trouver un nouveau point de chute, à un meilleur niveau. C’est dire si la Premier League est plus compétitive que la Ligue 1. Le club de Swansea n’a presque rien à perdre dans cette affaire, le risque qu’André Ayew ne se plante en Premier League est extrêmement bas : le joueur a prouvé par le passé sa constance, sa solidité mentale et a toujours montré de la détermination. Arrivé en Lorient en 2008, il vantait déjà un contexte exigent entretenu par C. Gourcuff et une équipe joueuse. Un « contexte idéal pour franchir des paliers » où il « aura essayé d’acquérir plus de maturité pour revenir plus fort à l’OM ». Le voilà maintenant. A l’époque, il avait joué une grosse vingtaine de matchs au sein d’une solide équipe de Ligue 1 qui n’hésitait pas à ouvrir le jeu. André Ayew avait 19 années. Bien qu’il n’eut pas un rôle de première importance dans l’effectif des Merlus, il aura donné un fier coup de main à Vahirua & consorts. Déjà du gagnant-gagnant, le joueur revenant, après un autre prêt, cette fois ponctué d’une montée dans l’élite avec Arles-Avignon, au Vélodrome, devenant un pilier de l’ère Deschamps à l’OM.

… où son profil aura fait plus que manquer dans l’histoire de Swansea en PL

En effet, André Ayew est le premier ailier gauche gaucher qui évoluera en tant que titulaire du poste pour Swansea en Premier League. Tout en se doutant que le joueur ignorera sans doute la statistique qui semble incongrue, elle est en fait lourde de sens : cela fait plusieurs saison que le côté gauche est occupé par des droitiers, du côté du Liberty Stadium. L’an passé, Wayne Routledge et Freddy Montero ont partagé le poste, auparavant Dyer y était souvent exilé, tout comme Pablo Hernandez voire épisodiquement Scott Sinclair. Toujours, des joueurs susceptibles de faire des courses vers l’intérieur, ce qui laissait plus de responsabilités, il est vrai, à l’actuel Spur Ben Davies ou à Neil Taylor d’apporter offensivement, depuis le poste d’arrière latéral gauche. Si Wayne Routledge ou Freddy Montero disposait de quelques armes pour prendre l’intervalle extérieur, le jeu de Swansea gagnerait en équilibre offensif avec l’arrivée d’un ailier gauche gaucher (d’autant qu’à droite, ils n’ont jamais, pendant ces 4 saison de PL, aligné de gaucher). André Ayew apporterait cet équilibre. Et pas uniquement offensivement. Le Ghanéen est connu pour sa polyvalence, et même Garry Monk vanta lors de la conférence de présentation cette qualité, et souligna qu’il faisait plus que l’apprécier. André Ayew est un très bon défenseur, un joueur qui ne voit pas d’ingratitude à la tâche défensive et le fait bien. Or, le milieu des Swans, capable techniquement, avec son duo Ki – Shelvey avec en pointe et relai Sigurdsson, est une salle des machines bien huilée… à l’huile d’olive. Façon de dire qu’elle ne manque de gourmandise, le pressing étant parfois aussi zélé qu’indiscipliné.

Didier+Deschamps+Andre+Ayew+Marseille+Training+G5TIzExEVC2l

Fou-fou, diront certains, comme DD. André Ayew a appris de ces années avec Deschamps, et cultivé ce gout pour l’effort discipliné. Monk pourrait même, par morceaux de matchs, songer à le repositionner dans l’axe, ou de façon plus axial, afin d’aider notamment Shelvey, coupable (certes de moins en moins souvent) de fautes de concentration, ou d’un enthousiasme trop grand. André Ayew est donc un joueur de côté gauche gaucher, capable de jouer dans l’axe et qui aime défendre et ce de façon bien rangé. Tout ce qui manquait aux Swans depuis toutes ces saisons. Mais sans y perdre offensivement, tant le joueur est complet et dispose d’une palette de savoir-faires large. Le Liberty Stadium pourra désormais rugir sur autres choses que le crochet extérieur de Routledge suivi d’un centre extérieur pied droit… avant de se demander où est passé l’ailier sur phase défensive. Ou de regretter qu’il n’ait pas un semblant de timing sur les centres de Sigurdsson venu de la droite. Le Ghanéen, ne l’oublions pas, est aussi un formidable joueur de tête. Timing et précision seront aussi utiles défensivement qu’offensivement. C’est tout à l’avantage d’André Ayew que d’arriver tel un chainon manquant dans un effectif : il ne révolutionnera pas le jeu des Swans mais le fera évoluer positivement, le diversifiera, le rendra plus difficile à prévoir et contrecarrer. Une addition des plus utiles et pertinentes. Voyez-la les raisons qui sous-tendent l’union entre André Ayew et Swansea. Et vous, vous en voyez d’autres ?

 

Crédits photo : Zimbio, Swansea Official

Tim Sherwood mérite-t-il la dithyrambe pour son parcours à Villa ?

Scirwodu, voilà d’où provient le nom de famille de Tim, en vieil anglais. À opposer à la forêt junglesque dite d’Hollywood, elle est celle, clairsemée de clairières, que l’on ne laisse pas se développer spontanément, qu’on maitrise par la culture. Et donc exploitée, parfois de façon intensive et totale. Sherwood, c’est aussi le nom d’un faubourg actuel de Nottingham, autrefois ainsi boisé. C’est également en ces lieux qu’est né Robin Hood, selon les légendes écrites sur l’encapuchonné justicier, comme le veut bien dire Hood. Robin des Bois, en France, donnait aux pauvres ce qu’il volait aux riches, dans un soucis, mi-mesrinien, mi-snowdenien, de justice. Revenons à notre cher-Wood, qui sorti du bois, ou plutôt du tunnel plaqué plastique de Wembley, rendait une tenue plus proche de séduire les dernières interprètes féminines principales de Skyfall ou Quantum of Solace que les classes prolétariennes de Birmingham. Les yeux claires et le faciès bluffant, Tim Sherwood semblait tout aussi sûr de son fait au coup d’envoi que nonchalamment dépité au coup de sifflet final. Avec en filigrane cette désinvolture un peu pédante. Tandis que Wenger nous a une nouvelle fois offerts ce visage qui nous narre les tensions qu’il traverse depuis maintenant 19 saisons, comme une coupe à vif d’un vieux chêne, dont chaque strate nous raconte l’âpreté d’une année. Chaque match étant une tempête, ou il faut accepter de plier pour ne pas rompre. Voyons voir si cette analyse superficielle, étymologique voire nominale peut-être trompeuse. Si l’habit ne fait pas toujours le moine, la tonsure n’est pas le propre du pêcheur, alors regardons si Tim Sherwood fût à la hauteur, contre Arsenal, de son nom.

Voilà la question que nous nous poserons ici, qui sera plus l’occasion d’un exercice critique de son approche de la finale de FA Cup que de la globalité de sa prise en charge, depuis la 26ème journée, de l’équipe d’Aston Villa. Ceci dit, nous l’aborderons, et cette analyse d’un massive* game (notons qu’Aston Villa se fait appeler massive club, Sherwood avait aussi des comptes à rendre, comme ses joueurs, vis-à-vis de cette dénomination) sera l’occasion de parallèles avec les clefs du maintien des Villans. Tim, comme Robin, tâcha-t-il de mettre toutes les chances du côté du petit pour dérober au gros le trophée de la Coupe d’Angleterre ?

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De la légende au story-telling

Quel est le pas à franchir pour passer du simple story-telling à la légende ? La différence semble être le sujet sur lequel se pose les mots de l’un et l’autre des exercices de style : dans un cas, le traitement est adapté, l’histoire légendaire portant sur un individu qui a presque contraint ceux qui l’écrivent à l’écrire comme telle car les actions de l’individu légendaire sont réellement d’ordre légendaires. Ainsi, le ou les écrivains de la légende n’ont qu’à rester fidèles aux faits. Bien évidemment, dans les faits, justement, il est très difficile de retrouver des légendes qui soient véritables en tant que le ou les personnages qu’elles mettent en scène ont bel et bien fait ce qu’elles narrent. Robin Hood, lui-même, fut tout autant une légende qu’une victime d’un story-telling, c’est-à-dire d’une manipulation intéressée et distordante de la réalité. Ce qui peut déboucher, bien entendu, sur des incohérences absurdes ; tel notre cher Robin – des champs, puisque c’était un yeoman, c’est-à-dire un membre de l’élite paysanne Anglaise, à en croire la majorité des histoires sur sa personnes – qui, raconté par l’historien britannique Rodney Hilton, en a fait un symbole de la révolte paysanne. Malaise intellectuel flagrant.

Cette déconnexion entre réalité et narration de celle-ci existe toujours, bien que nos héros ne soient plus tous des paysans élitistes qui squattent les bois pour rééquilibrer l’imposition à leur sauce, c’est-à-dire en rendant une justice saupoudrée de flegme et de violence pour la haute, qui est en fait la plus haute qu’eux. Passons. Tim Sherwood, à l’instar de toute personnalité Anglaise du football Anglais, qu’elle soit un joueur, un entraineur, profite d’une hype persistante dans les médias, et même auprès de certains consultants, soucieux de soigner leur côte de popularité. Il ne s’agit pas ici, le plus souvent, de dire que tout ce qu’il fait est bien, mais de trouver la moindre once de dessein de raison pour dire du bien et d’envahir l’espace médiatique avec. Le spécimen-joueur de l’effectif de Villa est le dénommé Jack Grealish. Celui-ci n’a pas l’arc long mais les chaussettes baissées. Le jeune rebelle, comparé à Pirès par les deux journalistes qui entouraient Robert sur BeInSport en avant-match, nous a gratifiés d’ailleurs d’un match imbuvable, lui qui fut parachuté par son entraineur bienfaisant, lui le droitier pour l’instant exclusif, en ailier gauche, tandis qu’Hutton était préféré à Bacuna en tant qu’arrière droit, derrière un autre vrai-faux-ailier (comprendre, selon l’expression inconsacrée, un ailier gaucher exclusif à droite, Charles n’Zogbia cet après-midi-là). Revenons à Tim-Tim, le plus grand de tout les petits héros. Quelle est vraiment l’histoire de Tim Sherwood à Aston Villa ?

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La meilleure légende en commentaire gagnera un sourire de Jores Okore

Son prédécesseur, l’Écossais Paul Lambert, était à la tête de l’équipe première du club depuis plus de deux saisons complètes. Son bilan, famélique sur le plan offensif, semblait aller de mal en pis, le club sombrant pour son dernier match en charge, dans la zone de relégation après une défaite à Hull 2-0, qui permis à l’époque aux Tigers de sortir de la zone de relégation. Le club, en proie à des conflits entre supporters et dirigeants, semblait au bord du gouffre et le changement s’imposa de lui-même, sans autre forme de justification que la peur de descendre. L’équipe de Lambert signait une première moitié de saison catastrophique offensivement parlant, surtout parce qu’il ne pouvait pas compter sur un Benteke longtemps blessé, puis sur le retour, suite à une rupture du tendon d’Achille contractée le 3 Avril 2014. Si il retourna sur les terrains dès début Octobre 2014, il mit quelque temps à retrouver une forme physique complète, en plus de faire totale abstraction d’une blessure qui l’a fait manquer le Brésil. Ce fut six mois sans pratique du football. Évidemment, passés ces 180 jours, il faut un certain temps pour revenir au meilleur de sa forme, et à nouveau faire corps avec son enveloppe. Le Belge, à la fois pivot dans les transitions offensives, par sa capacité à conserver le ballon et remiser le ballon dans des tempos dont devraient s’inspirer son compatriote Romelu Lukaku, était surtout le buteur prolixe de cette équipe les deux dernières saisons, malgré que la précédente fût elle aussi placée sous le signe du bobo majeur. Son retour progressif, notamment physiquement, pour un attaquant ayant pour habitude de se coltiner et de travailler au corps deux défenseurs centraux, correspondra à l’arrivée de Sherwood. Le Belge scora 11 de ses 13 buts cette saison de la 28ème à la 37ème journée, et Aston Villa joua ses deux derniers matchs en roue libre, tandis que la finale de la FA Cup était l’objectif absolu de cette fin de saison 2014-2015. Mané en profita, à l’avant-dernière journée, pour inscrire ce preste triplé, où les défenseurs de Villa nous montrèrent autant de verve et de gnac que les milieux Villans à se jeter sur le second ballon que Walcott catapultera dans les filets de Given pour ouvrir le score dans cette finale remportée sur un violent 4-0 par les Gunners.

Sherwood a, ceci étant dit, une certaine part de responsabilité dans ce redressement. Il aura permis à Benteke de tirer ses coéquipiers vers le haut en donnant un souffle positif et offensif à l’une des pires attaques de la Premier League jusqu’à son arrivée. Son principal coup, qui relança le joueur, autant que Benteke et tout le Massive Club, sera de remplacer épisodiquement le rocambolesque arrière droit Alan Hutton par le Hollandais, plutôt ailier, Leandro Bacuna. Celui-ci délivrera régulièrement de superbes galettes à Benteke, et permis au flanc droit de Villa, à défaut d’être assuré défensivement, de représenter une menace offensive, grâce aux capacités physiques et techniques de l’ex-joueur de Groningue. Capable de centrer avec précision et force à l’arrêt, le choix du très bon tireur de coups de pied arrêtés directs ou indirects symbolise ce que l’on voudrait voir plus souvent de la part des entraineurs : une prise de risque positive, au lieu d’un choix quasi-frigide, malgré la nullité absurde et évidente d’un choix défensif. Alan Hutton, en plus de ne rien apporter offensivement, n’est même pas une assurance derrière. Le destituer au profit de Bacuna est une des raisons pour lesquelles Benteke, de retour au top physiquement, a pu aligner les perles pour maintenir à flots les Villans.

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« Diantre, Christian, dire que t’as sué tout ça pendant que je croupissais sur le banc. »

En résumé, Sherwood a rééquilibré une équipe au jeu stéréotypé, trop axial, en complétant ses ailiers, qui brillent par leur qualité de jeu intérieur, par l’apport de latéraux plus verticaux, au jeu extérieur et qui aiment déborder et centrer. C’est en ce sens que Bacuna aura été un acteur majeur du maintient de Villa en Premier League, et de l’intense remontée au classement des buteurs de Benteke. De fait, si Villa joue toujours de façon passive, la construction des transitions offensives est plus proactive que chez Lambert, où les latéraux n’apportaient pas autant leur pierre à l’édifice, raison pour laquelle l’intéressant Lowton végète tristement derrière Hutton, et maintenant Bacuna, dans la hiérarchie au poste d’arrière droit. Il faut dire que les dits-ailiers n’aident pas trop des mises en place plus courageuse, par leur manque d’implication défensive. Sur le premier but d’Arsenal hier, c’est clairement et Delph et surtout n’Zogbia qui laisse un trou béant entre la défense recroquevillé à 6mètres sur le centre de Monreal. Le late run de Walcott paiera ainsi, tandis que le pauvre Hutton, déjà pas très doué, se retrouve délaissé. Il se jette dans la mauvaise direction pour contrer le finish confiant et spontané au premier poteau de Theo.

Un style clairsemé sur le banc, des ambitions encapuchonnées sur le terrain

Si Tim Sherwood a fait preuve de courage, de générosité et de conviction en mettant dans de meilleures dispositions Benteke en championnat, il ne fit pas preuve d’une telle vertu hier après-midi à Wembley. Hutton est choisi pour occuper le flanc droit, tandis qu’en dessous de l’étoile du sapin de Noël qu’il nous a concoctés sont alignés les deux créateurs que sont censés être Grealish & n’Zogbia. Problème, les latéraux ne montent plus et de toutes façons Grealish a la tête dans les chaussettes, en plus comme elles sont baissées, ça l’oblige à baisser le regarde encore plus bas. Manque plus que la capuche. Toujours en –uche, il y a bien sur coqueluche et surtout autruche. Les Villans mettent la tête sous leur 25mètres, même après l’ouverture du score d’Arsenal, qui arrive curieusement grâce à Walcott, dont la titularisation semble discutable face à un bloc aussi bas et compact. Peu participatif dans le jeu, Theodore est, il est vrai, un danger constant, qui pèse sur la tête de l’arbitre assistant ; pris hors-jeu à deux reprises en première mi-temps, l’Anglais nous gratifiera aussi de merveilles de contrôles moisis et de choix douteux, mais son triplé en PL et son ouverture du score rendra amnésique une bonne partie des supporters d’Arsenal. La vérité, c’est que Giroud était épuisé, et que l’Anglais semble euphorique de retrouver les terrains, ce qui n’est pas négligeable à l’heure d’aller cueillir un titre pour conclure une saison au terme de laquelle Arsenal se qualifie directement pour la Ligue des Champions ; ce qui n’est pas arrivé depuis, tout de même, 2011-12. Le Français, auteur d’une saison de très bonne facture, manqua par les facilités qu’il apporte à la construction du jeu pour les Gunners, et pour sa bien plus grande qualité technique. Défensivement, il apporte également bien plus, que ça soit sur coups de pied arrêtés ou au pressing. Heureusement pour Walcott, Villa n’a même pas montré un engagement égal à Arsenal. Les petits ont choisi d’accepter leur rang, leur leader leur coupant les vivres ; c’est une sorte de quarantaine elle-même, en centres et ballons exploitables face aux buts pour Benteke, que la disparition du XI de Bacuna

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« Leandro, je compte sur toi pour mettre tes couilles sur le pré, me déçois pas »

Au milieu, Delph avait beau se démener et Westwood réguler, la frustration et les fautes gratuites laissèrent place aux bonnes intentions, pas mêmes invitées à rentrer sur le terrain. Si Arsenal mit une partie des chances de son côté pour remporter la FA Cup, avec notamment la meilleure prestation de la saison de Francis Coquelin, dont j’ai vivement critiqué l’évaluation générale médiatique ici-même, les Villans se sont faits estropier par leur propre ‘sauveur’ d’entraineur, Tim Sherwood, de leurs uniques chances de dérober le trophée aux Canonniers. Comment voulait-on, alors, qu’ils baissent leurs capuches pour sortir du bois et s’emparer du pré avec la volonté de gagnants qu’ils peuvent être. Tim Sherwood a bel et bien contribué au maintien de Villa, mais il a aussi participé activement à la déroute des siens face aux Gunners hier, par frousse. Ce malgré toute les apparences qu’il a pu mettre en travers de l’analyse. Tim Sherwood n’est ni James Bond, ni Robin Hood, mais simplement Tim Sherwood, un entraîneur – pour l’instant – banal de plus.

*massive est aussi transparent que trompeur : s’il figure la taille d’une chose, c’est aussi une image pour dire que cette chose a de l’importance ; une taille symbolique, en somme.

Crédits photos : Zimbio

#4 The Interview : la data, d’Opta à Canal+

Il y a quelques mois, nous lancions la nouvelle rubrique « The Interview » par un entretien avec Rob Bateman, Directeur du Contenu et des Services de Clientèle pour Opta, leader mondial des statistiques.

Pour nous recentrer sur l’Hexagone et avoir un lien direct avec la France et l’Angleterre, nous recevons aujourd’hui David Wall, que vous retrouvez chaque semaine dans la « Data Room » de Canal+ et qui est également rédacteur en chef d’Opta.

Nous lui avons posé différentes questions sur le rôle de la « data » et son utilisation. Témoin privilégié de la « data-sphère » française, il nous livre ses impressions.

Data Room - Canal+
Data Room – Canal+

Comment arrive-t-on chez Opta Sport, après quelles études ?

J’ai débuté à Opta après un master de journalisme à Londres.  C’était en 2007, époque où nous n’avions pas encore de bureau français.

Quand on travaille pour Opta, quelle fonction a-t-on ?

Je m’occupe du bureau éditorial France + Benelux, donc surtout la relation avec les clients médias (L’Equipe, Canal +, beIN, etc) et les clubs pros. Pour ce qui est de la composition du bureau éditorial, ils viennent d’horizons divers. Certains ont une formation de journaliste mais ce n’est pas une obligation.

Tu es également consultant dans la Data Room de Canal+. Comment se cumulent les deux fonctions ?

L’émission est née à l’été 2014. Canal + avait la volonté de faire une émission spécialisée sur les chiffres et la tactique dans le football, sans se donner de limites. En clair, pousser le bouchon le plus loin possible.

Je baigne dans la data au quotidien donc c’est plutôt rafraichissant de pouvoir les utiliser dans le cadre d’une émission. Notre liberté est quasi-totale, c’est aussi ça qui rend l’expérience si enrichissante.

Peut-on utiliser les statistiques pour tout dans le football ? Comment les rendre légitimes et utiles ? Sont-elles un argument majeur ou plutôt un exemple illustrateur d’un argumentaire ?

Si on les utilise correctement, les stats permettent d’éclairer un match. J’insiste sur ce point, une utilisation responsable est clé lorsque l’on veut apporter de la crédibilité à un chiffre. Je parle souvent de contextualisation de la stat, c’est à dire donner vie au chiffre en lui donnant un ordre de valeur et en faisant des recoupements. Par exemple, le PSG avait eu 75% de possession contre Evian TG en début de saison, un ratio exceptionnellement élevé. Cependant, sur les 1000 et quelques ballons touchés, seuls 9 l’avaient été dans la surface adverse. S’arrêter à la possession n’aurait raconté qu’une partie du match.

Pour moi, la stat peut être à la fois un élément d’illustration mais aussi le départ d’une réflexion. Dans le premier cas, elle vient confirmer une intuition, la stat apportant une sorte de validation scientifique. Elle peut également révéler une facette qu’on n’avait pas nécessairement remarquée à l’œil nu. Elle peut enfin être « juge de paix » lors d’une polémique par exemple. Il y a quelques années, Arsène Wenger avait poussé un coup de gueule en conférence de presse après la jambe cassée d’Eduardo face à Birmingham City. Il avait affirmé qu’Arsenal était l’équipe qui subissait le plus de fautes en Premier League et qu’elle était la plus sévèrement sanctionnée. Les journalistes présents avaient immédiatement appelé Opta pour savoir si c’était vrai. Disons que ce n’était pas 100% correct…

Après, chacun a son jugement sur la pertinence des stats. Je ne suis pas un ayatollah du chiffre. Mais il y a aussi une hypocrisie de certains qui disent systématiquement que les stats ne veulent rien dire alors qu’ils sont les premiers à reprendre une donnée à leur compte lorsque celle-ci va dans leur sens.

Le plus dure est-il de récolter les statistiques ou de les utiliser convenablement ? N’as-tu pas l’impression que les gens tendent à « surutiliser » les stats ?

Les deux sont des défis. Il faut voir la concentration requise par nos analystes qui doivent loguer près de 2000 évènements par match (tout ce qui se passe avec le ballon : chaque passe, tir, duel, interception, etc). Ils ont en moyenne 3 mois de formation avant d’être lancés sur des matches en ‘live’.

L’analyste sait qu’il n’a pas le droit à l’erreur lorsqu’il s’agit de collecter les événements clés (le nom du buteur, passeur, du joueur averti, etc). Ces informations sont envoyées aux médias, clubs pros mais aussi aux bookmakers, pour lesquels une info précise et quasi instantanée est essentielle.

On utilise donc finalement une partie infime des données collectées. Mais c’est justementà travers l’utilisation de ces données qu’il faut être prudent. Par exemple, dire qu’un joueur a le meilleur ratio de passes réussies d’un championnat alors qu’il n’en a tenté qu’une quinzaine est aberrant.

Comme dans tout secteur, il peut y avoir tendance à trop en faire. Le chiffre est froid à la base. Utilisé dans les médias, il doit apporter une info nouvelle et si possible décalée afin d’éviter de perdre le lecteur ou le téléspectateur dans des analyses trop alambiquées. La stat peut aussi être drôle et surprenante.

Ton héritage culturel britannique et tes connaissances sur la Premier League te donnent un rôle central sur les critiques tactiques envers l’Angleterre. Qu’en penses-tu ?

La naïveté des clubs anglais ? C’est un faux débat. On ne disait pas ça quand la Premier League avait 4 quarts-finalistes en C1 à la fin des années 2000. Et puis on a bien José Mourinho en PL.

Tout comme l’Angleterre était un précurseur dans l’utilisation des statistiques, elle a également contribué ces dernières années à mettre en avant la chose tactique, comme Michael Cox et son Zonal Marking ou encore l’ouvrage de Jonathan Wilson ‘Inverting The Pyramid’.

Alors d’accord, l’ADN Albion, à travers l’équipe d’Angleterre, peut quelques fois se perdre dans l’obsession du 4-4-2, but nobody’s perfect.

Je crois comprendre que tu as un penchant pour Arsenal. Arrives-tu encore à regarder les matchs sans penser aux statistiques ?

Quasiment impossible. J’adore (essayer de) trouver des perles statistiques pendant les matches. Que ce soit positif ou négatif pour mon équipe. Les statisticiens du foot sont un peu pervers. Twitter s’y prête parfaitement: la meilleure stat est toujours la plus courte, celle que l’on comprend instantanément.

Les statistiques n’expliquent pas tout, mais comment prouver que les chiffres ne donnent pas une idée exhaustive de la situation ?

Encore une fois, je pense qu’il s’agit de la responsabilité de chacun et notamment d‘Opta. Il ne s’agit pas de faire du chiffre pour du chiffre. Certaines stats sont évocatrices en elles-mêmes : si je vous dis que Messi totalise plus de buts que de matches, ça suffit. Mais la majorité du temps, il faut savoir filtrer ou recouper les informations afin de trouver LA stat la plus parlante, que ce soit pour un commentateur ou l’analyste vidéo d’un club lorsqu’il fait une présentation détaillée à un joueur.

En 2015, les statistiques sont partout. On ne peut plus y échapper quand on parle foot. Sommes-nous à l’apogée des statistiques ou une « progression » est-elle encore possible ?

Il y a encore plein de belles choses à faire avec la stat. La progression, ce sont par exemple les ‘analytics’ qui nous permettent de donner un sens encore plus profond à une stat. Prenons les passes décisives, concept finalement assez récent. Le principe des analytics, c’est de dire qu’il ne faut pas s’arrêter à cette donnée mais pousser encore plus loin pour trouver les joueurs qui sont tout aussi créatifs que les meilleurs passeurs d’un championnat mais qui ne sont pas récompensés par leurs partenaires. Apporter une nuance à un jugement, c’est aussi cela qui est important.

Heurs et malheurs d’un déséquilibre structurel : le calendrier

L’échec retentissant des différents clubs anglais en Europe a fait émerger plusieurs hypothèses. Pour expliquer le malaise, on a souvent critiqué la Premier League, le niveau des clubs et des joueurs, mis en avant l’échec sportif du modèle anglais et tenter – souvent en vain – de trouver des réponses concrètes.

Si les réponses sont souvent concrètes, leur objectivité reste à déterminer. Ainsi, cet article souhaite mettre en avant un autre aspect souvent mentionné, rarement appuyé ou expliqué. Je ne souhaite pas prétendre détenir la réponse, bien au contraire, il s’agit tout simplement de proposer quelques pistes de réflexion « universelles ».

A travers ces lignes, j’ai souhaité me focaliser sur le calendrier de la Premier League et plus précisément sur le déroulement d’une saison. Pour tenter de contextualiser ces données brutes, j’ai essayé de leur donner du relief en comparant les cinq championnats majeurs d’Europe. L’article s’articulera en trois axes que vous allez découvrir au fil de la lecture.

Un championnat domestique chargé et déséquilibré

D’abord, il est intéressant de noter la durée d’une saison puisque celle-ci varie d’un championnat à un autre. L’Angleterre débute à la mi-août, plus tard que la Ligue 1 mais plus tôt que la Liga ou la Série A, par exemple.

durée champ

On peut penser qu’une ou deux semaines en plus (ou en moins) ne changent pas drastiquement la donne. Pourtant, en fin de saison, quand les matchs se sont accumulés pendant plus de 9 mois, une semaine supplémentaire pèse.

Surtout que la Premier League a la (fameuse ou fâcheuse ?) particularité de ne pas faire de trêve lors de la période des fêtes de fin d’année. C’est le Boxing Day, qui s’étend jusqu’au nouvel an. En effet, entre le 20 décembre et le 1er janvier, 4 journées sont jouées (de la 17 à la 20e). J’ai essayé de voir quel impact cette période avait sur les équipes de tête de la Premier League :

boxing day

Aucune équipe ne fait un sans faute mais certaines s’en sortent bien avec 7 points. Ici, l’hypothèse est la suivante (et elle est plutôt évidente) : si les équipes arrivent à limiter la casse en prenant un maximum de points, l’impact est à analyser sur le plus long-terme par l’accumulation de la fatigue.

L’autre élément qui diffère selon les championnats, c’est le nombre de journées jouées en semaine.

Journées en semaine

Sans surprise, la Premier League domine ce tableau. De ce fait, les équipes enchaînent parfois 3 matchs de championnat, donc d’une seule compétition, en à peine une semaine.

Un conflit entre le calendrier domestique et le calendrier européen ?

L’Angleterre a débuté la saison avec 6 représentants en Europe : 4 en Ligue des Champions (Arsenal, Chelsea, Liverpool, Manchester City) et 2 en Ligue Europa (Everton et Tottenham). Liverpool a par la suite continué sa route en Europa tandis que les 5 autres équipes se sont qualifiées pour la phase suivante.

Le calendrier européen s’applique à tous les pays concernés, il n’y a donc pas de distinction à faire. Toutefois, j’ai souhaité analyser l’impact de ce double-calendrier sur les équipes de Premier League.

défaite apres europe

En moyenne, près d’un tiers des défaites de ces clubs proviennent après une rencontre européenne. Si les résultats en Premier League n’ont pas toujours été flamboyants après ces matchs, ceux en Ligue des Champions ne l’ont pas été non plus. Arsenal et Manchester City ont fini deuxième, Liverpool est passé à la trappe et Chelsea est la seule équipe à avoir remportée son groupe. Tottenham a fini second en Europa League et Everton, seule équipe à jouer cette compétition à fond, a remporté son groupe.

Victoire après europe

Chelsea n’a jamais perdu après un match en Europe, mais est, avec Tottenham, l’équipe qui remporte le moins de matchs. Mis à part Arsenal, aucune équipe n’a remportée plus de 50% de ses matchs.

Il est clair que le problème est double : les résultats ne sont pas (vraiment) positifs dans les deux compétitions.

Le rôle des coupes et leur impact

Le système des coupes domestiques n’est pas le même dans les 5 championnats majeurs. L’Angleterre, tout comme la France, a deux coupes (la FA Cup et la Capital One Cup, équivalent de la Coupe de la Ligue). La particularité de l’Angleterre est le « replay » quand il y a match nul (hors demi-finale) en FA Cup, aussi vétuste qu’historique, il complexifie encore un petit peu plus le calendrier et le cerveau des organisateurs. Il y a donc la nécessité de retrouver une date en dehors des périodes déjà prises – comme les journées en semaine.

Par exemple, Liverpool a été éliminé en demi-finale mais a joué 2 replays ce qui ramène à 7 le total de matchs joués dans cette compétition. A l’inverse, Arsenal en a joué 5 et jouera le 6e en finale. De plus, Liverpool est l’équipe qui a joué le plus de matchs dans les deux compétitions. Ils ont atteint les demi-finales dans chacune pour un total de 12 matchs de coupe. En comparaison, le PSG qui a atteint la finale en Coupe de France et en Coupe de la Ligue, n’a joué que  10 matchs au total.

Dans l’autre compétition, la Capital One Cup, comme c’est le cas en Italie, la demi-finale se joue en aller retour. En Liga il n’y a qu’une coupe mais tous les tours se jouent sur double confrontation.

Autre spécificité similaire à la France, la FA Cup se déroule le weekend (alors qu’en Italie, Espagne ou Allemagne, c’est en semaine). Ainsi, le calendrier est rallongé et la « compression » de matchs lors de la période des fêtes en plus des matchs en semaine compensent l’accumulation des rencontres.

Matchs joués par leader

Venons en maintenant au total de matchs joués par les leaders actuels des cinq championnats. A la fin de la saison, Chelsea aura joué 54 rencontres. Un chiffre somme toute assez normal si d’une part on compare avec les autres championnats mais surtout si Chelsea avait atteint les demi-finales de la Ligue des Champions, par exemple. Or, si l’on détaille le calendrier, Chelsea n’a joué que deux tours en FA Cup, a remporté la Capital One Cup et a été éliminé en huitièmes de finale en Europe.

Si l’on prend comme référence une équipe de « standing » de Premier League, qu’on compare son calendrier avec une équipe similaire de Liga ou de Ligue 1 et qu’on part du principe que cette équipe remporte toutes les compétitions, voici ce que nous obtenons :

Premier League : 38 matchs de championnat, 6 matchs de FA Cup, 6 matchs de Capital One Cup, 13 de Ligue des Champions pour un total de 63 matchs. En Liga 60 matchs et 61 en Ligue 1.

Encore une fois, 2 ou 3 matchs supplémentaires ne changent pas énormément de choses en ce qui concerne les chiffres. Sauf qu’avec l’accumulation des rencontres et surtout avec l’enjeu qui augmente plus la saison s’approche de sa fin, il est difficile de penser que cela n’a pas d’importance.

Voilà qui pour conclure nous donne quelques éléments de réflexion quant à l’organisation du calendrier de la Premier League. On peut en mettre plusieurs en avant :

–          Le système de replay a-t-il vraiment un quelconque intérêt ? Le fait de rejouer un match embête plus qu’il ne plait les différents clubs concernés.

–          La légitimité de cette deuxième coupe vaut-elle réellement la surcharge de matchs ? Un trophée est un trophée, certes, c’est indéniable. Toutefois, les équipes n’y portent globalement que peu d’intérêt.

–          La tradition du Boxing Day mérite-t-elle d’être renouvelée ? L’accumulation des matchs corrélée à la fatigue qui s’amplifie en fin de saison fait-elle de la trêve une idée inconcevable ?

Evidemment, le calendrier n’est qu’un des différents facteurs pour expliquer la grande méforme des clubs anglais en Europe. D’autres explications sont également crédibles et méritent d’être creusées. Au-delà du résultat et de la qualité des équipes, la Premier League a certainement des problèmes structurelles ancrées depuis des années et l’organisation de ses saisons en est certainement un.

@Backothedoc

#3 The Interview: Mile Sterjovski, de joueur à formateur

Passé par l’Angleterre et surtout la France, Mile Sterjovski est un des rares australiens à avoir joué dans le championnat hexagonal. Il a été pendant près de 10 ans un international australien et a été de l’aventure australienne en 2006. Cette année-là, l’Australie se qualifie pour la première fois à une Coupe du Monde depuis 1974. Une centaine de matchs joués en France avec le LOSC dont plusieurs dans les différentes coupes d’Europe (Ligue des Champions et Coupe de l’UEFA) et des souvenirs à foison.

Il a pris le chemin de l’Europe venant de l’Australie sans transition, la France, la Suisse, la Turquie puis l’Angleterre. Derby County l’accueille en 2007 et Sterjovski reste 2 saisons. Témoin privilégié, entre la langue de Molière et celle de Shakespeare, nous avons eu la chance de discuter avec lui.

Vous avez eu une carrière très mouvementée puisque vous avez joué dans 6 pays différents (Australie, France, Suisse, Angleterre, Turquie et Chine). Quand vous y repensez, êtes-vous satisfait ? Pouvez-vous choisir une aventure en particulier ?

Je suis très satisfait de ma carrière. Je crois beaucoup au destin, que tout arrive pour une raison, il n’y a pas de hasard et de fait, je ne voudrais changer aucune ligne de ma carrière. Le football a toujours été ma passion. Mon père et mon grand-père m’ont fait découvrir le foot à 2 ans et depuis, j’adore, je ne m’en lasse pas !

S’il fallait dégager une aventure en particulier… le meilleur moment de ma carrière ? Indéniablement quand j’ai joué en France, au LOSC.

Sterjovski

Alors justement, parlons-en un petit peu de Lille. Vous avez quitté l’Australie à 21 ans pour rejoindre le club en 2000. Que pouvez-vous nous dire sur ce grand saut vers l’Europe ?

A l’époque, le transfert a eu lieu après que mon agent ait montré au LOSC et à d’autres clubs en Europe des vidéos de moi. Ensuite, je suis venu à Lille pour un essai de 2 semaines. J’ai toujours joué en confiance et même quand je n’étais pas confiant, j’ai toujours essayé de montrer le contraire ! La première différence que j’ai remarquée en arrivant en France était la vitesse du jeu comparé à l’Australie. Tout allait plus vite et il y avait beaucoup plus de joueurs de qualité.

Et comment était la vie en France ? En gardez-vous un bon souvenir au point de toujours suivre leurs résultats ?

Ma première année fut difficile mais agréable à la fois. Les trois années suivantes furent géniales. Lille a vraiment été une belle aventure – ma préférée en tout cas. Je suis toujours leurs résultats. Malheureusement, les matchs ne sont pas diffusés à la télévision en Australie. Je crois que le fait d’avoir perdu quelques joueurs leur a fait mal. Malgré cela, je crois qu’ils ont un bon effectif qui est capable de jouer le top 5 voire top 4. Ils ne peuvent pas se permettre d’avoir des joueurs blessés, surtout des joueurs comme Rony Lopes. C’est un joueur très important pour l’équipe. J’espère que Lille pourra le garder !

Par la suite, vous avez pris la direction de la Suisse et plus précisément du FC Bale. Vous avez atteint les quarts de finale de l’ancienne Coupe de l’UEFA. Pouvez-vous nous parler du niveau comparé à la France ?

Le niveau du football en Suisse est en dessous de celui en France. Toutefois, c’était quand même un très bon championnat qui a fait de grands joueurs. A l’époque, Scott Chipperfield m’a ouvert la porte pour venir en Suisse, il a beaucoup aidé dans le transfert. J’ai passé trois excellentes années, nous avions notamment remporté la coupe et le championnat en plus du quart de finale européen. Je pense également que la Suisse est un bon endroit pour les Australiens qui souhaitent débuter leur carrière en Europe. S’ils arrivent à enchaîner plusieurs bonnes saisons, ils pourront progresser et rejoindre un plus gros championnat.

Vous avez pris la direction de la Turquie, pour un an, avant de rejoindre Derby County. Vous n’avez pas joué tout de suite, il fallait beaucoup de patience. Enfin, vous avez obtenu du temps de jeu. Que dire sur le football anglais ?

Il ne faut pas se jeter bêtement dans les stéréotypes, mais disons que la plupart des équipes se concentrent sur la condition physique. Les équipes en Europe sont plus techniques et plus tactiques pour moi. Je pense que le fait que la Premier League se joue tout le long de la période des fêtes de Noël, avec le Boxing Day et le nouvel an, rend le football si spécial en Angleterre. C’est une période dense mais les fans adorent ça et la plupart des joueurs aussi.

Au-delà de votre carrière de joueur, vous êtes également impliqué dans la formation. Vous avez crée MSFC (Mile Sterjovski Football Coaching). Qu’est ce que cela représente exactement ? Que dire sur la formation australienne ?

J’ai crée MSFC 6 mois avant la fin de ma carrière – il y a un peu plus d’un an. Je voulais utiliser mon expérience, la partager aux enfants et aux entraîneurs de façon à ce qu’ils progressent le mieux possible. MSFC concerne les enfants de tout âge. La chose la plus importante, ce qui est primordial pour moi, c’est qu’ils s’amusent en apprenant. L’entrainement et la formation ont changé et évolué en Australie mais je ne sais pas s’il y a eu une amélioration. Il y avait beaucoup plus d’Australiens qui jouaient dans des grandes équipes européennes et d’Angleterre en mon temps. Avant cette évolution, nous avions formé les deux meilleurs joueurs que l’Australie n’a jamais eu : Harry Kewell et Mark Viduka.

Quel est votre avis sur la A-League ? Le championnat s’est développé (sportivement et économiquement). Egalement, quel est-il sur l’équipe nationale australienne ? L’Australie n’a cessée de changer depuis l’arrivée de Postecoglou en comparaison à Verbeek et Osieck.

La A-League a beaucoup progressé depuis sa création (sous cette forme) il y a 10 ans, et c’est normal. Elle se rapproche des plus petits championnats d’Europe mais elle a besoin d’un immense coup de pouce financier pour passer dans la cour des grands. Je pense que dans 10, 15 ans nous verrons des changements importants, positifs et nécessaires, autant économiquement que qualitativement.

En ce qui concerne l’équipe nationale, les Socceroos ont un effectif très jeune. Si la majorité d’entre eux continue de jouer à un haut niveau et continue de jouer ensemble avec l’Australie, je les imagine aisément briller.

Par rapport à votre carrière internationale maintenant… Cet aspect là aussi de votre carrière a été réussi. Vous avez 42 sélections pour 8 buts. Vous étiez de l’aventure en 2006, à l’apogée de la « Génération dorée »…

J’ai deux souvenirs principaux en sélection. Ma première fois sous les couleurs australiennes (contre l’Ecosse) et bien sûr ma participation à la Coupe du Monde 2006.

Même si notre élimination a été très douloureuse, surtout de cette manière [l’obtention d’un penalty très généreux par Grosso en toute fin de match, ndlr], il faut féliciter l’Italie. Ils ont joué à 10 pour la majorité de la rencontre et nous n’avons pas réussi à en venir à bout. Nous ne sommes pas passés loin d’éliminer les futurs champions du monde, mais ils ont probablement mérité de passer lors de notre affrontement.

Francis Coquelin, Français coqueluche, anatomie d’une contagion

Toute fin décembre, alors qu’approchaient et la période du mercato hivernal et le basculement dans la seconde partie de saison, avec toutes les échéances nationales ou européennes que cela comprend, Arsène Wenger ne pouvait ignorer que son effectif semblait troué ; il manque un élément défensif à son milieu de terrain, les performances de Mati Flamini et Mikel Arteta (de toutes façons trop souvent arrêté par ses blessures) sont insuffisantes. Évidemment, les médias en tout genre se voyaient heureux de pouvoir faire la rumeur autour d’un probable futur transfert : on parle ici de Schneiderlin, là on ne saurait trop trouver de nom, mais toujours est-il qu’il existe un besoin vital, il faut mettre la main à la poche, oh oui, Arsène, satisfais notre désir de milieu défensif !

En attendant, les choses semblent plus apaisées au sein du club-même : Wenger fait revenir Francis Coquelin de prêt de Charlton et lui donne rapidement la place qu’avait Flamini dans la rotation. Si les deux joueurs vont être alignés ensemble à Upton Park pour le dernier match de l’année 2014, on ne les verra plus jamais titularisés simultanément. Et c’est ainsi que Francis Coquelin s’est imposé dans le onze de départ des Gunners, apportant sa fraicheur physique autrement supérieure à celle d’un Mati Flamini harangueur mais qui n’a plus l’activité qu’on lui connaissait – et qui faisait sa force, ainsi qu’une exemplarité mentale toujours bienvenue dans l’effectif d’Arsenal. Depuis, les médias n’hésitent pas à présenter Coquelin comme la recrue qu’attendaient les Gunners. Titulaire, autoritaire même, le jeune Français semble impressionner aussi bien les observateurs que les fans d’Arsenal dans cette position de milieu de terrain à vocation défensive. Loin de l’idée de l’émerveillement continuel devant chacun de ses tacles ou chacune de ses passes, nous allons ici tenter de décrire quel joueur est vraiment Francis Coquelin et comment juger son rôle dans cette seconde partie de saison d’Arsenal. Et pourquoi pas tenter de décrypter l’avenir de Francis.

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Coquelin, un joueur renversant ; Crédits : zimbio.com

Un bilan flatteur à réviser, recontextualiser

Si 78% des 23 matchs qu’il a disputés pour Arsenal cette saison se sont soldés par une victoire, c’est tout à l’honneur de Francis Coquelin, signe qu’à minima il remplit parfaitement le rôle d’Arsène Wenger dans chacune de ces rencontres. Comparativement, Flamini détient un winrate de 66% en 32 rencontres, qui reste honorable, comparé aux 52% en 27 rencontres de Wojceh Szczesny, qui aura lui uniquement joué durant la première moitié de saison, tandis que Flamini rentre encore parfois en cours de jeu lors de cette seconde partie. La période forte dans la saison d’Arsenal correspond, sur le plan chronologique au moins, il est vrai avec le retour puis l’avènement dans le onze du lavalois, aucun doute là-dessus. Mais est-il vraiment l’addition qui changea toute la donne pour les Gunners ?

Toujours est-il que Coquelin semble monter en puissance. Tranchant dans ses interventions, il a même paru être, par exemple, la lame de fond du milieu d’Arsenal face à Liverpool le week-end dernier lors de la victoire 4-1 d’Arsenal. Impossible pour les Reds de franchir par la passe ou le dribble le français, au faciès impassible, nettoyant dans toute la largeur l’axe d’Arsenal, non sans manquer de verticalité ; il n’est pas seulement ce joueur de duel infranchissable, il montre qu’il sait lire le jeu et réaliser une pelletée d’interceptions. Sans jamais, cet après-midi là, laisser se dérouler les transitions offensives si terrifiantes des Reds à leur souhait. Mais sera-t-il toujours aussi impérial ?

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Il ne faut pas décontextualiser les performances de Francis Coquelin. Face aux Reds, par exemple, Rodgers étrennait une dernière fois son backthree, alors qu’il n’aligne pas d’avant-centre aguerri, laissant à Sterling le loisir de s’exténuer face à Koscielny et Mertesacker. Le jeune Anglais, aussi talentueux crocheteur et explosif à la course puisse-t-il être, ne sait pas faire deux choses capitales dans le système de l’ancien assistant de José Mourinho : si ses enchainements dos au but sont rapides, ses frappes manquent tant de puissance que de précision ; on peut le dire, Walcott est un meilleur finisseur que le joueur d’origine Jamaïcaine. Deuxièmement, Sterling n’est pas encore une option crédible dos au but, sa protection du ballon est correcte mais sera effective s’il parvient et à se retourner et à se lancer. Son manque de puissance physique le dessert alors énormément. Sterling, en un sens, n’est utile qu’à lui-même en numéro 9 et ne permettra pas cet après-midi à son bloc entier de souffler, déjà qu’il souffre à cause de la titularisation non-axiale de Henderson, qui affaiblissait beaucoup les dispositions défensives des Reds. Emre Can, en manque de repères, va progressivement perdre le fil du match, et se voit expulser après une faute de frustration, qui ne constituait pas son premier acte manqué du match (plusieurs choix irréalistes dans la dizaine de minutes la précédant).

Coquelin, cet après-midi, a donc rayonné sur un Liverpool raté de Rodgers, qui modifia radicalement ses plans seulement 4 jours plus tard à Ewood Park face aux Rovers en FA Cup, pour une victoire 1-0, mais accompagnée d’une douche d’occasions, grâce à un backfour solide, un Sterling désaxé et un Henderson ré-axialisé pour le bien de l’équilibre lors des transitions, comme lors des sièges offensifs ou défensifs. Oui, Coquelin a performé contre une opposition affaiblie, et n’a constitué que le versant défensif de la victoire d’Arsenal. Il s’est contenté, et c’est tout à son mérite, selon l’expression non consacrée, de donner la balle aux offensifs d’Arsenal, par des passes courtes, neutres, sobres. Le consultant Pierre Ménès se fendit même de son commentaire le plus pertinent de la partie : « Coquelin a le mérite de ne jamais faire ce qu’il ne sait pas faire. » Cette observation prend bien du sens lorsqu’on se demande pourquoi Coquelin se met autant en valeur lorsqu’il intervient, quand un joueur comme Özil, ou Ramsey, dans la même équipe, n’est jamais aussi bon que quand sa participation au jeu est furtive ? (j’entends dans un sens temporel)

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Jouez !

Enfiler le Coquelin, c’est l’adopter

Il est de coutume de dire qu’un bon arbitrage est un arbitrage inaperçu. Un arbitrage qui mène le jeu est en quelque sorte un arbitrage qui libère le jeu et ses acteurs. Par ses décisions, l’arbitre, donne ainsi les limites du cadre dans lesquels les acteurs vont pouvoir s’exprimer dans le respect des règles. L’arbitre est d’une certaine façon un meneur de jeu, sans forcer, ni même contraindre, il fait plier. Il souffle dans le verre. Un grand arbitre, n’a-t-on jamais osé dire, n’est il pas un grand numéro 10 ? J’ose croire que Mesut Özil ou Aaron Ramsey, qui sont tout les deux des joueurs qui mènent le jeu, qui prennent des décisions, qui guident la balle et le jeu là où ils le veulent mais aussi là où ils pensent que les choses les amènent à l’emmener, ne sont jamais aussi bons que lorsqu’ils rendent le match plus fluide, qu’ils donnent une harmonie aux mouvements des joueurs avec le ballon. Ils sifflent par leurs pieds, administrent par leurs touches des sanctions aux ballons qui se doit de rester dans les limites, blanches, du terrain de la règle. Pour finir, éventuellement, par entrer dans le but, ce qui n’est pas peut-être pas aussi final qu’on le pense pour ces joueurs, pour ces meneurs. Or, Francis Coquelin n’est pas de la catégorie de ceux qui affinent. Francis Coquelin est en quelque sorte la condition d’existence de ce corps de métier. Difficile de savoir qui est le Coquelin de l’arbitre. Certes, la comparaison s’essouffle ici, mais l’important est de saisir que Coquelin est un besoin. Il comble un vide, un rôle ingrat et peu demandeur intellectuellement, ou techniquement, dans un jargon plus footballistique. Ses capacités physiques, sa générosité et son humilité technique suffisent à générer l’admiration et les louanges des observateurs, et surtout des fans. Comme s’il avait manqué aux arbitres un sifflet, des cartons, une tenue officielle. Aucun moyen d’exercer leur loi, de dicter, de guider le jeu. Oui, l’allégorie respire à nouveau. Francis Coquelin est aussi beau qu’il n’est simple, aussi important qu’il n’est basique. Il ne faut pas trop en faire sur ce que nous n’avions pas eu depuis quelque temps à Arsenal. Flamini, dépassé physiquement, était une parodie de réponse au besoin. Il était un carton rongé par la souris, un sifflet bouché, une tenue délavé. Mais le manque altère le jugement.

Francis Coquelin n’est pas plus que ce qu’il n’est. Francis Coquelin n’est pas rare. Francis Coquelin n’est pas fou, Francis Coquelin est utile. Il est au service. Francis Coquelin est une condition. Francis Coquelin ne détient que très peu et ne peut pas pas beaucoup. Francis Coquelin n’a qu’un pouvoir : celui de donner le moyen du pouvoir à ceux qui peuvent beaucoup, à Arsenal. Mesut Özil a besoin de la balle pour décider. Malheureusement, et c’est un malheur tout bien mesuré, et Mesut Özil le sait lui-même, le jeune effarouché de Gelsenkirchen n’est pas un footballer total. Il ne sait pas aussi bien défendre qu’attaquer, il a besoin que quelqu’un l’aide à mener le ballon, à arbitrer le jeu, que le ballon reste dans les limites et soit régulé, en quelque sorte, par ses mouvements, ses touches de balle, ses talons et ses louches. Francis Coquelin est exactement ce qu’il manque à Arsenal, lorsqu’il est en pleine possession de ses moyens. Évidemment, il n’est pas que muscle et interventions défensives. Évidemment, Coquelin a bien du mérite de s’être imposé. Objectivement, Francis Coquelin sait faire quelque chose d’un ballon. Mais il n’est pas un arbitre du jeu. Il ne mène pas. Il délègue, non par choix, mais par amoureuse obligation, ce rôle à des joueurs comme Özil. Il lui transmet l’objet de pouvoir, le précieux, la sphère dans laquelle le meneur du jeu peut lire l’à-venir. Et y transplanter sa vision, sa pensée, sa réflexion, son calcul d’une situation dont les paramètres ne font qu’évoluer. Il est vrai que vous pourriez trouver des passes de 40m lobées de Francis Coquelin, mais vous pouvez les compter sur les doigts d’une main, et pour une réussie combien de ratées, de mal dosées, mal frappées, mal claquées, mal brossées ? Coquelin s’exprime sur un terrain par le muscle, avec une adresse relative. La passe n’est pas son verbiage. Ses statistiques sont faméliques dans ce domaine. Il n’est pas un crack. Francis Coquelin est un joueur vraiment excellent dans la condition physique, qui a visiblement beaucoup progressé tactiquement et mentalement en très peu de temps à Arsenal et par les expériences qu’il a eues dans différents clubs (Lorient, Fribourg, Charlton) au travers de prêts. Il est désormais apte à tenir un rôle défensif important au sein de cette équipe d’Arsenal, il est le garant numéro 1 de la transition défensive d’Arsenal, dont l’axe est maintenant solidifié depuis la venue de Gabriel. Et il est capital qu’il sache faire des passes simples et rapides aux garants de la transition offensive et de la construction en générale. Mais il faut remettre à sa place – expression qui n’est pas négative en soi, mais juste, équitable – Francis Coquelin. La place d’un assistant, d’une condition. Et pas la meilleure qui soit, qui plus est. Mais la choisir, c’est l’assumer. C’est assumer de gagner 4-1 contre les Reds à l’Emirates, comme assumer de se faire baffer par Monaco dans ce même stade.

Francis Coquelin
Crédits : zimbio.com

Une bonne solution d’urgence, une piètre solution d’avenir

La revenue de Francis Coquelin est une solution d’urgence des plus aisées pour le club d’Arsenal. Le joueur, en prêt, est ravi d’être rappelé (configuration mentale qui doit aider le joueur à être impliqué à fond désormais) et pour le club, le coup de l’opération est nul. Alors, si en plus le joueur surprend en s’imposant avec une certaine autorité et assurance (ce pourquoi Coquelin a un certain mérite), tout en même temps qu’il réussit à ne pas faire plus qu’on ne le lui demande (un effort de sobriété que trop rarement constaté aujourd’hui, même à ce poste), et ajouté au fait que les résultats du club s’en trouvent améliorés car le poste qu’il vient occuper était carrément vacant (sans aucune offense faite au généreux et dévoué Flamini), et vous obtenez une contagieuse tendance à l’émerveillement devant les performances de Francis Coquelin, en occultant le contexte sportif de ses performances (excellent face à Liverpool, ignoble quand dépassé physiquement en 1/8ème de finale aller de LDC) et le contexte psychologique de l’observation.

Prenons le cas de ce match aller face à Monaco. L’ouverture du score de Monaco, parfois perçue comme un coup du sort, fût l’œuvre de G. Kondogbia, milieu de terrain au physique compétitif pour Francis Coquelin. Ce soir-là, l’énergie, la détermination, l’âpreté au duel de Francis Coquelin n’ont pas suffit à récupérer aussi haut que d’habitude le cuir, et ainsi donner la direction du match à Özil, placé dans l’axe par Wenger, par bonheur. Évidemment, la prétention de tout les Gunners ce soir-là, et la conviction des joueurs monégasques qu’ils pouvaient faire un résultat à contribuer à rendre le résultat de ce soir-là invraisemblable, avec cette victoire 3 à 1 de Monaco à l’Emirates. Le point est qu’on a vu ce soir-là toutes les limites du joueur, celles que lui-même connait mieux que personne. Si Francis Coquelin fait des passes simples, ne courbent pas ses trajectoires pour accélérer le jeu, n’est pas un box-to-box, c’est qu’il n’en a pas la capacité. Il n’est pas question de problème mental pour ce joueur. Francis Coquelin est un jouer mentalement abouti. Et c’est assez rare pour le signaler dans l’effectif d’Arsenal, c’est un joueur mentalement fort, et qui se sait restreint. Son potentiel, fort limité, doit nous amener à penser l’avenir d’Arsenal sans lui. Francis Coquelin dépannera tant que son physique le suivra, que sa tête acceptera son rôle d’adjuvant, que son corps encaissera le devoir. Il permettra à Arsenal, dans cette Premier League, d’accéder à la Ligue des Champions en cette fin de saison. Il réalisera peut-être 7 interceptions contre Chelsea à l’Emirates, ou peut-être pas, parce que Mourinho alignera une meilleure version de lui-même en la personne de Ramires dans sa zone.

Car oui, Coquelin est l’incarnation des défauts des précédents mercatos d’Arsenal. Non pas que je signifie ici que les précédents mercatos d’Arsenal aient été ratés, mais qu’ils n’ont pas été totalement réussi. Les profils à la Coquelin, pourtant pas si complexes, ne sont pas si courants lorsqu’on veut qu’ils répondent réellement à des critères d’exigence élevée ; il s’agirait de trouver un joueur fort physiquement et mentalement, mais qui puisse réaliser un fort impact physique sans mettre une trop grande partie de sa force en jeu. Ainsi, plus cette maitrise est élevée plus l’intervention a de chances d’être réussie à chaque fois (dans le sens « légal » mais aussi productif/réutilisable de l’intervention). Un joueur comme Ramires, que je décris comme supérieur en tant que Coquelin-like à Coquelin, parvient parfois à écoper de cartons stupides par manque de maitrise de lui-même. Surtout quand il est en manque de rythme, d’ailleurs. Pourtant, El Kenao n’a pas l’air si fort que ça, c’est pour cela qu’en rythme, il peut mettre beaucoup d’impact sans tomber dans l’excès d’engagement et ainsi convertir une balle adverse en situation de transition offensive en quelque seconde par une intervention dans les pieds. La différence profonde entre les deux joueurs, outre cette capacité à maitriser et ainsi convertir, réside dans l’apport en fin de transition offensive de Ramires, celui pouvant marquer comme passer. Cf Barcelone – Chelsea 2012

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Crédits : zimbio.com

Alors quels joueurs, futurs arrivants, pourraient menacer la place de Coquelin la saison prochaine ? Les médias ont beaucoup parlé, et parlent encore et toujours de la venue de Morgan Schneiderlin à Arsenal. Outre le fait que le joueur soit Français, ce qui plaît énormément à C+, qui en a fait sa coqueluche des underdogs de la PL, tandis que Francis est la la nouvelle tête frenchie à Arsenal, ne faisant qu’augmenter la probabilité de surévaluation du rôle de Coquelin dans les performances récentes d’Arsenal, le profil de Morgan Schneiderlin induit en erreur les rumoristes en tout genre. S’il joue bas sur le terrain, l’ex-strasbourgeois n’a pas du tout la même palette que le mayennais. Formé à pour jouer numéro 10, si Schneiderlin a appris à aimer tacler dans les divisions inférieures avec les Saints, il n’en reste pas moins un joueur de construction, un penseur, un… arbitre du jeu. Formidable en phase de possession comme en transition, ou même dans les zones de « vérité » (a.k.a de prises de décision), Schneiderlin a besoin d’un Coquelin pour détenir le ballon, bien qu’il puisse le saisir lui-même. Statuons là-dessus : former à tenir la balle, aligner aux côtés de la faucheuse Wanyama à Soton, je peux certifier que les récupérations ou interceptions de ce milieu sont collectives. Le pressing qu’ils instaurent tout deux divisent le mérite qu’ils ont à en récupérer des ballons. J’assume, Schneiderlin ne ferait pas autant de stats défensives sans Wanyama, ou un joueur au profil similaire. Idem, Wanyama n’aurait pas autant amélioré son apport offensif sans sa complémentarité, sa discussion avec le Français. En bref, Schneiderlin n’est pas un remplaçant de Flamini ou Coquelin, et si Schneiderlin doit les remplacer alors il faut reconstruire tout le milieu de terrain et le projet de jeu. Car un milieu de terrain Schneiderlin – Ramsey + 4 devants, cela fait encore un meneur de plus. Ou alors Schneiderlin devrait encore plus se réinventer… un pari bien trop risqué.

Schneiderlin est une fausse piste. Wanyama, moins cité, beaucoup moins cité, serait lui une amélioration à Coquelin. Plus solide physiquement, mais aussi moins gauche et plus clef dans ses techniques de passe, le Kényan apporterait beaucoup à Arsenal. Cependant, je connais mal sa régularité mentale et son impact psychologique générale, je suis ceci dit plutôt positif à cet égard. Son arrivée, dans les medias Français du moins, serait plus discrète, ce qui serait fort amusant au regard de l’apport assuré du joueur dans l’effectif. Ce qui n’empêcherait pas d’alterner avec Coquelin. La qualité première de ses joueurs est physique, ne l’oublions pas. C’est à Arsenal, et pourquoi pas à vous, chers lecteurs, de réfléchir aux autres futures pistes d’addition pour Arsenal l’an prochain dans le cœur du jeu. Car oui, même si j’ai décrit le rôle de Coquelin comme moins noble, il est vital. Et la vitalité est l’assurance d’une certaine beauté.

Gabriel Paulista: le lien manquant à Arsenal

Alors qu’Arsenal connait des problèmes relativement conséquents concernant sa stabilité défensive, la seule et unique recrue des Gunners cet hiver a été Gabriel Paulista. Le Brésilien est arrivé en provenance de Villarreal pour une somme avoisinant les 15M€.

Gabriel offre en premier lieu une solution quantitative supplémentaire puisqu’Arsenal a débuté la saison avec seulement 3 défenseurs centraux de métier (dont Chambers, 19 ans, qui n’avait que peu d’expérience professionnelle). Les différents pépins physiques de Koscielny ont conduit Wenger a faire jouer ses latéraux dans l’axe : Monreal a tenu ce rôle neuf fois, Debuchy deux fois.

Si le nouveau venu arrive comme troisième défenseur, il s’agit également de s’intéresser à son style de jeu. Pour l’instant, il n’a joué que 5 rencontres (3 en tant que titulaires dont 1 en FA Cup) mais son profil a déjà montré qu’il pourrait apporter une alternative à l’équipe.

Koscielny et Gabriel : une base de travail solide

Quand Koscielny est arrivé à Arsenal en 2010, il était presque inconnu de tous. L’Angleterre l’a rapidement découvert et après des débuts difficiles, le Français s’est imposé comme un des meilleurs défenseurs du championnat. A force de travail, il a su corriger les défauts du début de son aventure à Londres.

Gabriel ressemble beaucoup à Koscielny. Tous les deux ont des capacités similaires et il est difficile de le voir comme un frein, mais plutôt comme une paire capable d’être compatible. Le profil de Gabriel est plus profitable à Arsenal, sa vitesse, sa justesse technique bien qu’inférieure à celle de Koscielny et surtout sa capacité à bien se positionner sont des atouts non-négligeables pour Arsenal.

L’arrivée de Gabriel pourrait être positive pour Arsenal mais également pour le titulaire indiscutable de la défense : Laurent Koscielny. Si l’on prend les dernières rencontres des Gunners, l’équipe a tendance à outrageusement dominer l’adversaire en première mi-temps et d’avoir une plus ou moins grande période difficile en seconde période. L’influence de Gabriel stabilise la défense, le défenseur français compris. Malgré les assauts adverses, la défense a affiché une relative sérénité.

De plus, pour instaurer un pressing collectif, Koscielny et Gabriel sont les parfaits éléments pour construire une base. Plus à même de tenir une ligne rigide, ils disposent des attributs techniques et tactiques pour éviter de nuire à l’équipe. En cela, les deux joueurs marquent individuellement les adversaires et disposent d’une bonne pointe de vitesse pour défendre correctement.

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Crédits : zimbio.com

L’incompatibilité de Mertesacker

A l’inverse, malgré son statut de capitaine (vice-capitaine en réalité, mais Arteta est souvent blessé), Mertesacker est loin  de faire l’unanimité. La preuve,  Wenger l’a laissé sur le banc contre Everton et Newcastle. On peut également penser que la blessure de Gabriel contre QPR lui a permis de jouer.

L’incompatibilité de Mertesacker réside dans l’antithèse que son jeu représente par rapport aux attentes de Wenger. Certes moins qu’avant, Arsenal joue haut – que ce soit au niveau du pressing ou de la ligne défensive. Deux nuances néanmoins sur ce point : d’abord, Arsenal a beaucoup de mal à trouver l’équilibre et a rester constant. Ensuite, il y a eu une mutation importante récemment contre les équipes de plus gros calibres.

Toutefois, les errances de Mertesacker ont montré certaines limites qu’Arsenal se doit de corriger. A plusieurs reprises, l’Allemand s’est retrouvé dans la moitié de terrain adverse, parfois plus haut que les milieux de terrain. En conséquence, Arsenal s’est totalement ouvert à l’adversaire par exemple contre Monaco. Quand son rôle doit être de mener la défense, son incapacité à le faire pose automatiquement problème. Contrairement à lui, Gabriel ne reste pas en retrait, il défend en allant de l’avant et cherche à mettre une pression immédiate sur l’attaquant. En récupérant le ballon ainsi,  il permet de construire l’attaque de derrière.

Au-delà du « cliché », la lenteur de Mertesacker ne permet pas de jouer comme Arsenal le souhaiterait. Plus vif et discipliné, Gabriel propose une solution différente. Sur les matchs qu’il a disputés, on a pu voir sa capacité à lire le jeu : il réalise largement plus d’interceptions (6 contre 2 par tranche de 90 minutes). Aussi, avec le même système de calcul, il a le meilleur taux de l’équipe en termes de duels remportés avec 73%. Gabriel remporte même plus de duels aériens que le géant allemand (4.8 contre 2.9).

Les performances défensives de Gabriel contre Everton et Newcastle - StatsZone
Les performances défensives de Gabriel contre Everton et Newcastle – StatsZone

En définitive, il sera intéressant de voir la suite des événements pour Arsène Wenger et ses joueurs. Maintenant que le manager dispose d’une autre solution (certainement meilleure), il se pourrait qu’il continue à associer Gabriel à Koscielny. Une fois que Gabriel aura « dépassé la barrière de la langue » comme le joueur le dit lui-même, il ne pourra qu’être meilleur. A 24 ans, Arsenal a décidé d’investir pour préparer l’avenir.

#2 The Interview : le football anglais et la tactique (2eme partie)

Suite au début de notre entretien avec @ArsenalColumn, voici la deuxième et dernière partie. Elle sera organisée de la manière suivante :

  • Arsenal : Monaco, l’importance de Cazorla, le secteur offensif et Gabriel
  • Manchester United : le cas Di Maria, la nouvelle paire au milieu et les attaquants
  • Liverpool : le nouveau système de Rodger et l’importance de Can
  • Southampton et West Ham : réflexions sur leur déclin
  • Everton : Martinez et le contraste avec la saison précédente
  • Crystal Palace : l’arrivée de Pardew et leur ambition

English version : Part 2 Arsenal Column

Arsenal : Monaco, l’importance de Cazorla, le secteur offensif et Gabriel

J’étais au match aller et je me souviens qu’à 2-1, quand Chamberlain réduit l’écart à la dernière minute, je me disais qu’il venait de sauver Arsenal. Mais les joueurs voulaient marquer un autre but, les supporters les poussaient et voulaient l’égalisation. Donc quand j’ai vu Chamberlain avec la balle dans le rond central, tout le monde autour de moi hurlait pour que les joueurs aillent de l’avant – mais je disais à mon ami « Ne le faites pas !  Ne voyez-vous pas qu’il n’y a plus de défenseurs derrière ? ». 10 secondes plus tard le ballon était au fond de nos filets. C’était la même chose pour les deux premiers buts. On n’a pas appris de nos erreurs.

D’un sens, cela résume assez bien Arsenal : quand on évoque ce pour quoi ils sont bons, on parle de créativité, de technique. Mais une grande partie des matchs est psychologique. Tout est dans l’idée suivante : il faut créer la perception que nous sommes meilleurs que l’adversaire. Parfois, il semblerait que les joueurs se focalisent trop sur l’impression stylistique qu’ils donnent – jouer vite quand il faut ralentir le jeu, envoyer un autre joueur devant quand il est évident que nous nous exposons sur les contres. Cela remonte aux Invincibles. Une chose que les joueurs disent encore c’est qu’à l’époque, se faire sortir de la Champions League était leur plus grand regret, pas seulement parce que c’était une compétition qu’ils pouvaient gagner mais aussi parce qu’ils pensaient fermement être la meilleure équipe et voulaient le montrer au reste de l’Europe. Au final, lors du match aller contre Chelsea, les joueurs n’ont pas pu tuer le match quand Chelsea était à 10. Ils sont fautifs de cela. On peut dire la même chose de cette équipe contre Monaco sauf qu’à chaque occasion manquée, ils devenaient de plus en plus anxieux et finalement incrédules : ils n’allaient pas remporter ce match.

Je pense que Wenger n’a pas fait grand chose par rapport à l’approche « ultra-offensive » de l’équipe car il ne voulait pas casser le rythme des attaques. L’équipe se créait des occasions, c’est indéniable, mais ne les finissait pas. Il se base essentiellement sur la capacité des joueurs à faire leurs propres choix sur le terrain, et qu’ils sont guidés par leur intuition. Cette même intuition qui s’est faite au fil des rencontres et à l’entraînement. La plupart du temps, cela fonctionne et ils font exploser les équipes plus faibles. Dans les gros matchs, cela nécessite que les joueurs nuancent cette idée, qu’ils jouent en équipe, qu’ils se battent pour la même cause et qu’ils n’oublient pas leurs responsabilités car autrement, l’équipe peut craquer. Malheureusement, contre Monaco, les joueurs offensifs ont négligé la part de travail défensif de leur jeu. Ils ont failli combler le retard, mais en fait, le match était plié quand ils ont concédé le troisième but à l’extérieur.

Enough said (zimbio.com)
Enough said (zimbio.com)

A propos de Cazorla : il a été fantastique cette saison. Le rôle de milieu central a définitivement l’air d’être sa meilleure position mais cela ne veut pas dire qu’il ne doit pas aller se « balader » dans d’autres positions. Sa polyvalence peut-être très importante dans certains matchs et nous avons besoin de flexibilité tactique.

Ce rôle lui convient car dans le football moderne tout est une question de transition – à quelle vitesse vous pouvez emmener le ballon de la défense à l’attaque et vise versa – et les qualités techniques de Cazorla lui permettent d’être florissant. Défensivement, il s’améliore de match en match pourtant j’ai parfois l’impression qu’il est un peu passif au pressing, en étant trop bas trop rapidement. Ainsi, Arsenal n’a probablement pas le contrôle recherché par Wenger sur certaines rencontres. Mais c’est un problème d’équipe. Maintenant que Ramsey est de retour, il sera intéressant de voir comment ces deux joueurs qui excellent dans les transitions peuvent impacter le jeu au milieu et peut-être mettre en place une identité légèrement différente.

Je pense qu’Arsenal a surtout besoin de contrôler le jeu et en cela, Ramsey a une place toute trouvée dans le XI de départ. Pourtant, je ne pense pas qu’il soit capable d’égaler ses statistiques de la saison passée car il est trop inquiet à l’idée de marquer autant de buts au lieu de se concentrer sur ce qu’il sait faire de mieux : ses qualités pour être meneur de jeu. Wenger semble avoir mis en place un système qui lui permet de jouer plus haut sur le terrain et par incidence, amener de la sérénité dans son jeu et celui de l’équipe.

Aussi, je pense que dans le sprint final et certainement l’année prochaine, nous verrons un nouveau Ozil, un qui sera prêt à se hisser au niveau supérieur. Il s’est (re)découvert, il a compris comment il devait jouer dans le football anglais et dans son équipe. On a vu contre Monaco, au match retour, qu’il était plus volontaire, plus exigeant. Je pense que c’est de là que la critique provient : avec le montant de son transfert, on attend un Özil plus explosif mais il est subtile, plus « innocent » dans ce qu’il entreprend. Et il semble plus fort maintenant, plus à l’aise avec sa responsabilité dans l’équipe et apprendra à être plus égoïste – c’est paradoxal par rapport à son style. Pour moi, Özil est un des meilleurs meneurs de jeu du monde, quelqu’un qui complète une équipe parce que sa façon de bouger sans le ballon équilibre l’attaque. A Arsenal, son entente avec Alexis s’améliore, quand un revient vers l’axe, l’autre prend sa place, et cela devrait permettre aux Gunners d’améliorer et de perfectionner leur style.

Enfin, concernant la défense, j’aimerais aborder le cas de la recrue la plus récente d’Arsenal. Gabriel est essentiellement un Koscielny-bis, moins technique mais plus rugueux. En cela, il offre le meilleur des deux mondes. Je pense qu’à terme il remplacera Mertesacker bien qu’il ne faille pas totalement mettre l’Allemand au placard car ses qualités de leaders sont importantes pour Arsenal. Mais dans le même temps, Arsenal a besoin de jouer plus haut et cela implique une mutation de style, défendre plus haut sur le terrain. Gabriel offre cette possibilité car il est très bon à l’interception, suit son attaquant sur tout le terrain, comme nous l’avons vu avec Lukaku contre Everton. La manière dont Wenger installe son équipe pour presser veut dire que l’équipe marque individuellement de l’arrière vers l’avant. Les arrières centraux, Koscielny et Gabriel, peuvent former la base.

Manchester United : le cas Di Maria, la nouvelle paire au milieu et les attaquants

Di Maria a toujours été un joueur qui provoquait « l’anarchie » tactiquement – autant pour son équipe que pour l’adversaire. Il est vrai qu’il a réussi à ajouter de la stabilité au Real Madrid sur plusieurs saisons, comme une « navette » en tant que milieu gauche, et idem pour l’Argentine. Mais le but était de lui enlever un peu de cette responsabilité « de position » pour lui permettre de s’épanouir pleinement. Je pense qu’à Manchester United, il a peu souffert – malgré ses passes décisives – parce que les consignes sont assez rigides. Il n’en reste pas moins que c’est un joueur fantastique et maintenant que Manchester United a l’air d’avoir trouvé l’équilibre, il est possible d’imaginer que Di Maria soit employé à gauche, à la place de Young.

J’aime bien le système de Van Gaal. Il a trouvé un compromis qui lui permet de donner des libertés aux joueurs sur leur positionnement – Fellaini qui joue plus haut en tant que numéro 10, Mata et Herrera qui échangent de position quand le premier repique dans l’axe – tout en gardant le 4-1-4-1 qu’il aime tant. Cela montre ce que l’interchangeabilité – les « bons » mouvements – peut apporter à l’équipe. Ils sont plus flexibles et il est plus facile d’intégrer de nouveaux joueurs dans le système. Maintenant que Van Gaal a trouvé un certain équilibre, je pense que nous allons réellement les voir l’année prochaine.

Je pense que la déclaration de Van Gaal [qu’il n’a pas les attaquants nécessaires qui peuvent marquer 15/20 buts] est bizarre car aujourd’hui, marquer 15 à 20 buts n’est plus l’objectif ultime pour un bon attaquant, [les attaquants] doivent viser un but par match. Le calibre des attaquants dont dispose United est tel qu’un d’eux est capable de viser ces stats, mais peut-être que Van Gaal essaie de modérer les attentes. Après tout, c’est un nouveau système, une nouvelle façon de jouer, ils doivent s’y adapter. Peut-être qu’il voit également que son équipe manque de quelques ingrédients clés – à savoir de la vitesse et de la mobilité. En effet, il est impératif que les attaquants dans le système de Van Gaal aient ces attributs car en fait, c’est eux qui ont le plus de liberté au niveau des mouvements en étant autorisés à jouer sur toute la largeur de la surface d’attaque. C’est une accusation inquiétante pour Falcao ou van Persie si Van Gaal considèrent qu’ils n’ont pas ces capacités.

Angel Di Maria et Emre Can au duel (zimbio.com)
Angel Di Maria et Emre Can au duel (zimbio.com)

Liverpool : le nouveau système de Rodgers et l’importance de Can

L’évolution de Liverpool en 3-4-3/3-4-2 est incroyablement audacieuse en termes de management de la part de Brendan Rodgers. Elle intervient pile au moment où l’équipe avait besoin d’inspiration. Je pense que c’est un système « sans-forme » précise, mais génial car il tourne autour des deux milieux offensifs (habituellement Coutinho et Lallana) et de leurs mouvements. S’ils restent sur le côté, cela donne à l’équipe des situations en 3v2 sur les ailes, mais s’ils repiquent dans l’axe, ils sont en situation de 4v3 au milieu. Néanmoins, je pense toujours que ce système dépend beaucoup d’un certain contrôle au milieu de terrain, et c’est certainement pour cela qu’Emre Can est si important derrière. Il peut sortir, et ainsi leur donner un avantage numérique pour réduire les conséquences de ne pas avoir un « top » joueur pour gérer le jeu au milieu de terrain.

Je pense que Rodgers veut désespérément que Lucas revienne. C’est un milieu très sous-estimé et vital pour mettre en lien tous les nœuds du système de Liverpool, parfois en redescendant bas pour récupérer le ballon et parfois pour regagner le ballon devant le « back-four ». Devant, d’une certaine manière, il a besoin de faire jouer Sterling aux côtés de Sturridge parce que c’est la meilleure façon de reproduire le duo Suarez-Sturridge. Eventuellement, je changerais la structure du milieu pour jouer en « 1-2 » au milieu avec Coutinho et Henderson juste devant Lucas/Gerrard/Allen.

Southampton et West Ham : réflexions sur leur déclin

Le succès de Southampton cette saison est presque une justification d’une partie du manque de sophistication tactique en Premier League : leur tactique s’apparente à la Liga, par exemple. Mais ce n’est pas seulement pour l’aspect défensif, Ronald Koeman dit qu’il aime que ses milieux soient « cinq pas derrière [l’attaquant] pour faire une ligne de plus ». Il veut un positionnement cohérent en plus de l’organisation défensive, les deux points sont fondamentaux. Sur toute une saison, le niveau augmente et la « super-qualité » commence à faire son trou. Souuthampton, aussi bons qu’ils ont été, ne peut pas compter uniquement sur le collectif. Il est nécessaire d’y intégrer des joueurs de haut niveau et espérer qu’ils se surpassent quand l’équipe en a le plus besoin. Southampton n’a pas ce genre de joueurs et c’est aussi pour cela que leurs performances stagnent un petit peu. Je crois que Koeman l’a anticipé et qu’il a fait venir quelques joueurs créatifs au mercato hivernal. Aussi, la donne change quand les autres équipes commencent à vous « respecter » comme tel, et qu’ils se rendent compte que vous êtes potentiellement du top-niveau, certainement comme Everton peut le voir cette saison. Parce que les adversaires sont plus compactes défensivement, plus concentrés et vous laissent moins d’espace.

En ce qui concerne West Ham, je pense que la « faute » autant aux joueurs qu’à l’entraîneur. West Ham n’a jamais eu la profondeur d’effectif pour tenir sur la durée. Leur bonne forme de début de saison est devenue décevante et « Big Sam » est revenu à la base. Il a commencé la saison en étant un « manager créatif », celui qu’il croit être, jouant en formation « diamant » mais dès qu’ils ont une période dense de matchs, il bat en retraite et repasse en un mode défensif. C’est-à-dire un très basique système en 451. Je pense que de repasser avec deux attaquants peut galvaniser le peu qu’il reste pour West Ham cette saison.

Everton : Martinez et le contraste avec la saison précédente

Je crois que la saison dernière était un véritable régal pour les joueurs d’Everton, ils découvraient une nouvelle manière de jouer qui leur permettait d’avoir la balle et de gonfler leur « confiance » pour affronter n’importe qui. Cette saison, je crois que cela perd son charme car ce n’est plus novateur, ce n’est plus « frais » et ainsi, ils ont repris leurs schémas habituels et ne sont plus totalement conscient de ce qu’il faut faire pour battre l’adversaire. En conséquence, Martinez a essayé de mettre un peu de variété dans le jeu de son équipe, mais il n’a pas encore réussi à atteindre les objectifs requis. Je crois que l’infortune d’Everton se résume par les performances de Lukaku, qui semble avoir oublié comment prendre la profondeur. Au lieu de cela, il attend toujours le ballon dans les pieds, dos au but.

Crystal Palace : l’arrivée de Pardew et leur ambition

La volonté de Pardew a été amplifiée lors du match contre Arsenal, on entendait clairement ce qu’il voulait que Crystal Palace fasse : presser et demander plus le ballon. Le coaching en Premier League est tel que les équipes de mi-tableau (et plus bas) ne travaillent pas beaucoup leurs mouvements offensifs. A l’inverse, ils se focalisent sur la faisabilité des joueurs à trouver des solutions par de petits « curseurs » – comme la rotation au milieu de terrain et la consigne « montre-toi pour avoir la balle » (ce que Pardew a clairement dit à Zaha contre Arsenal) – et la préparation de match. Ainsi, il y a des limites pour Crystal Palace. Certainement pas le top 8, mais le top 10 doit être leur prochain objectif.

#2 The Interview : le football anglais et la tactique (1ere partie)

Pour le second volet de notre nouvelle chronique, nous allons passer des statistiques à la tactique. Face aux vives critiques des observateurs contre les clubs anglais, nous voulons proposer quelques pistes de réflexions. Nous avons choisi de développer la première partie ainsi :

  • Les connaissances tactiques en Angleterre sont-elles suffisantes pour associer la science tactique à la Premier League ?
  • De nouvelles pistes sur les raisons de l’échec anglais en Europe…
  • Chelsea : le titre et le cas Fabregas
  • Manchester City : le rôle de Silva, l’influence de Yaya Touré, l’arrivée de Bony et le mystère Mangala

Pour cela, nous accueillons le chroniqueur tactique du site Arseblog, fin admirateur des différents ressorts qui articulent l’analyse dans ce domaine précis.


Les connaissances tactiques en Angleterre sont-elles suffisantes pour associer la science tactique à la Premier League ? 

Je pense que nous le pouvons [associer la tactique et la Premier League]. Le fait que chaque année, à ce moment de la saison, les équipes anglaises semblent se “dévoiler” complètement en Europe n’aide pas. Toutefois, je pense que cela relève d’un excès de “romantisme” : il y a une certaine manière dont nous pensons que le football doit être joué – une idée vague en fait, pensons par exemple à Manchester United et son football ultra-offensif, tout le monde vers l’avant et des joueurs qui dévalent les ailes – que cela ressemble à une trahison du passé si nous ne le faisons pas, le tout mélangé avec un peu d’arrogance.

J’ai lu un article de Guillem Balague qui disait que les Anglais n’entraînaient pas assez les mouvements offensifs, au lieu de cela, ils se focalisent trop sur le conditionnement et la forme physique. Alors que d’un coté je suis d’accord par rapport aux équipes qui ne peuvent pas prétendre aux places européennes, je pense que d’autre part, c’est une généralisation injuste pour les équipes de têtes “établies”. Surtout si vous prenez en compte que Manchester City, Tottenham et maintenant Manchester United ont pris des coaches spécifiquement pour leur méticulosité. Concernant Manuel Pellegrini et Manchester City qui se sont fait sortir finalement plutôt “humblement”, son idéologie réside dans l’idée d’avoir constamment un positionnement efficace, avec des milieux entre les lignes. Mais dans le même temps, c’est un idéaliste qui refuse d’équilibrer et de trouver un compromis à son style offensif – ce qui vient renforcer ce que j’ai déjà dit auparavant.

Pour être honnête, parfois, je suis agacé par le manque de sophistication des équipes du bas du classement mais je pense que c’est à peu près pareil pour tous les championnats. Ces matchs tendent à être ennuyeux, pourtant, avec les droits TV, les équipes anglaises ont plus de visibilité. En revanche, même si le championnat est moins rigoureux tactiquement, je pense que nous avons la meilleure diversité dans les différents styles d’attaque puisque le football anglais a tendance à mettre en valeur l’individu beaucoup plus qu’ailleurs en Europe.

De nouvelles pistes sur les raisons de l’échec anglais en Europe… 

Les statistiques dans les matchs européens montrent que l’on court plus, que l’intensité est plus forte, qu’il y a plus de passes et plus de tirs cadrés. Cela vous dit immédiatement que vous ne pouvez pas jouer ces matchs avec la même approche qu’en Premier League. D’une certaine manière, Arsenal a été puni au match aller parce que l’équipe s’est crue supérieure à Monaco. Mais pour comprendre les matchs de Ligue des Champions, vous devez vous y intéresser du point de vue de Monaco. Ce n’est pas une équipe de « l’élite » mais ils ont d’excellents joueurs qui ressentent qu’ils sont de ce niveau. Cela veut dire qu’ils jouent chaque match comme si c’était une finale – tactiquement parlant – bien entraînés et focalisés sur leur plan de jeu. C’est la clé en Ligue des Champions, on doit toujours rester en éveil. Autrement, on est puni.

Pour Manchester City et Chelsea, non seulement ils ont été battus par deux des meilleurs équipes en Europe, mais ils sont coupables de ne pas avoir fait preuve de plus de subtilité dans l’approche du match. Chelsea en particulier s’est exposé à cela parce qu’en étant très réaliste, ils sont du même niveau que le PSG, mais quand les événements faisaient qu’ils devaient garder le ballon et tuer le match, ils n’ont pas pu le faire. A l’inverse, le PSG, à 10, l’a fait et a pris sa chance quand il le fallait. Par rapport aux deux buts – deux coups de têtes superbes – ils ont montré une détermination supérieure et dans ces moments-là, c’est peut-être la clé qui fait chuter Chelsea.

Je ne pense pas qu’il faille être trop inquiet pour la détresse du football anglais en Europe après ces défaites cependant, cela a montré qu’ils étaient en dessous du tout meilleur niveau. Au final, le football est fait de cycles, et quand les clubs anglais dominaient dans la dernière partie des années 2000, il y avait une réalité physique qui régnait, ce qui permettait aux « enforcers » et « destroyers » de proliférer au milieu de terrain. Ainsi, ils poussaient les meneurs de jeu en retrait (des joueurs comme Guardiola par exemple) en dehors du jeu. Tout partait d’une « spécialisation » et les clubs anglais faisaient cela à merveille quand on prend en compte une équipe comme le Chelsea de José Mourinho qui avait au milieu un « destroyer » (Makelele), appuyé par un récupérateur endurant (Essien) et un meneur de jeu (Lampard). Ils étaient rapides, physiques et techniques quand la situation le leur demandait.

Un peu plus tôt, Guardiola est revenu, comme coach cette fois, pour révolutionner le jeu, jouant avec une approche technique supérieure à toutes les autres. La possession était roi mais à ce moment-là, ils avaient également surpassés tout le monde en termes de « forme physique », et cela a pris 4-5 ans pour que quiconque les rattrape.

Maintenant, le condition physique est à son « apogée » – pourtant Guardiola est toujours le meilleur dans la capacité de ses équipes à garder le ballon – et cela veut dire que les joueurs doivent être « universalistes ». Le jeu migrant vers la « complétude », l’exhaustivité, les joueurs de transitions sont maintenant mis en avant – ces joueurs qui sont aussi bons pour aller de l’avant que pour revenir et qui peuvent passer de l’un à l’autre en un clin d’œil. Je ne pense pas que les clubs anglais ont trouvé l’équilibre jusqu’à maintenant, ce qui, au plus haut niveau, leur a montré qu’ils étaient un peu simplistes tactiquement.

Crédits : Sportinglife
Crédits : Sportinglife

Chelsea : le titre et le cas Fabregas

C’est l’équipe la plus complète. En-cela, je veux dire qu’ils ont le plan de jeu le plus robuste. Cela veut dire qu’ils bossent ensemble, « as a unit », qu’il n’y a que des petites faiblesses à exploiter même si cela les rend un peu « ennuyeux » dans les gros matchs. Mourinho est un entraîneur et un meneur d’hommes fantastique, sous-estimé techniquement aussi car il a fait progresser beaucoup de joueurs offensifs. Son « génie » réside peut-être dans le fait qu’il refuse de changer quand on avance l’argument « moral » qu’ils doivent jouer. Il n’y a aucune obligation et cela veut dire qu’il peut s’en tenir à défendre bas et détruire les équipes qui se livrent trop à eux, alors que dans le même temps ils ont assez de force et de créativité offensivement pour ne pas les considérer comme une équipe défensive (la plupart du temps). Je pense que de les forcer à sortir de leur « moule », comme Tottenham l’a fait lors de sa victoire 5-3, peut mettre en lumière certains défauts mais c’est incroyablement difficile à faire car Mourinho ne les laissera pas passer. Par là, je veux dire qu’il y aussi une limite pour Mourinho sauf s’il trouve un moyen pour ajouter de nouvelles armes en gardant une solidité défensive. Il a déjoué à cause de cela au Real Madrid mais les gens oublient qu’ils étaient une très très bonne équipe. Les équipes arrivent parfois à les embêter mais n’arrive jamais vraiment à être assez incisifs.

Concernant Fabregas, pour être honnête je n’avais jamais remarqué sa baisse de forme en seconde partie de saison à Arsenal parce que pendant longtemps, je voulais laisser de côté la moindre faiblesse. Mais en y repensant, je crois me souvenir qu’il a eu quelques blessures à ce moment de la saison, en 2010/2011 notamment où il pouvait aller encore plus loin. La pression doit certainement l’affecter. Il court plus que n’importe quel autre joueur mais la fraîcheur d’esprit qu’il a en début de saison lui permet peut-être d’être plus efficace. A Arsenal, il faisait partie d’une succession d’équipes aux failles mentales notables (principalement parce que les joueurs étaient jeunes), susceptibles de s’effondrer quand la pression devenait trop forte. J’ai toujours pensé que c’était un peu basique mais peut-être qu’il y a une certaine vérité là-dedans.

Manchester City : le rôle de Silva, l’influence de Yaya Touré, l’arrivée de Bony et le mystère Mangala

Pour comprendre l’importance de Silva à Manchester City, il faut comprendre Pellegrini. Il est un fan absolu du 442 parce qu’il veut jouer dans la moitié de terrain adverse, et il adore avoir des joueurs entre les lignes, qui se faufilent. Pour faire cela, il faut des ailiers qui reviennent dans l’axe profitant de la largeur créée par les arrières latéraux. Les mouvements latéraux de Silva sont superbes, parfois il finit même de l’autre côté du terrain. Il équilibre leur système en 442 généralement parce qu’il joue le rôle de troisième milieu de terrain sur les phases de possession. Je le préfère néanmoins sur un côté, même si dans les matchs européens, Pellegrini devrait probablement l’utiliser derrière l’attaquant, même s’il a horreur de cette idée, pour qu’ils soient plus compétitifs.

Je dois admettre qu’il n’y a rien de plus palpitant que de voir Manchester City démanteler les équipes « faibles » en Premier League. Leur jeu de position est un régal à voir. Yaya Youré y est pour beaucoup, passant le ballon entre les lignes avec beaucoup de rythme et d’efficacité. C’est un fantastique meneur de jeu. Toutefois, il n’est pas si bon défensivement et pour le travail défensif. Une partie de l’explication pourrait être qu’il en fait trop. C’est pourquoi, la plupart du temps, Roberto Mancini l’utilisait en milieu offensif, pour lui enlever la responsabilité de devoir se replier et lui permettre d’être juste « dévastateur ». A Barcelone, il était capable de se concentrer uniquement sur sa position pour bloquer les attaques. Dans le système de Pellegrini, il parle souvent de défendre en « rythme » mais Toure ne met pas la même intensité offensivement que défensivement. Ce n’est pas pour dire qu’il est mauvais défensivement ou fainéant, je pense que le système de City tend à être un peu « tout offensif » parfois. Dans ce sens, la naiveté de Cesc n’est pas autant exposé à Chelsea. Mais une nouvelle fois, c’est ce qui le rend si distrayant.

Concernant Bony, j’ai été surpris de son transfert car ce que City avait vraiment besoin c’était quelqu’un de créatif pour faire le lien. Jovetic a l’air de pouvoir tenir ce rôle mais il est souvent blessé, trop pour avoir un impact durable sur l’équipe. Bony fait une chose que seul probablement Giroud sait faire, c’est son habilité à être un « mur » pour les passes. Cela veut dire qu’il peut travailler avec les milieux mais, dans l’idéal, ce qu’il leur fallait était un faux-9 pour décrocher, jouer dans l’espace et faire le lien avec Aguero et Dzeko. Pas d’un autre 9 qui joue principalement au coude-à-coude avec le défenseur.

Enfin, je ne sais pas quoi penser de Mangala. Il a le physique nécessaire, ainsi que les attributs techniques mais il a souvent des sautes de concentration où il perd la balle ou laisse échapper l’attaquant. Je pense qu’il a eu du mal à s’adapter aux attentes de Pellegrini, cela nécessite que les défenseurs « poussent » plus haut, et parfois même s’interposent – ce que Kompany fait assez brutalement. C’est pourquoi je préfère réserver mon jugement le concernant mais pour l’instant, la somme investie semble plus qu’excessive.

Dans la prochaine partie :

  • Arsenal : Monaco, l’importance de Cazorla, le secteur offensif et Gabriel
  • Manchester United : le cas Di Maria, la nouvelle paire au milieu et les attaquants
  • Liverpool : le nouveau système de Rodger et l’importance de Can
  • Southampton et West Ham : réflexions sur leur déclin
  • Everton : Martinez et le contraste avec la saison précédente
  • Crystal Palace : l’arrivée de Pardew et leur ambition

English version :

Arsenal Column Part 1 

Que se passe-t-il à Everton cette saison ?

Les supporters d’Everton accumulent les grosses déceptions. La saison passée, le club se classait à une – pas totalement – surprenante cinquième place en championnat, synonyme de qualification pour la Ligue Europa et surtout, de meilleure saison en Premier League de son histoire. 72 points, 21 victoires, troisième meilleure défense au classement (39 buts encaissés sur toute la saison), de grosses performances face aux principaux clubs de PL. Bref, une grande saison pour un club de cette « envergure ». La première sous Roberto Martinez qui présageait une nouvelle ère, dans laquelle Everton figurerait parmi les cadors.

Or, il n’en est rien. La saison qui devait être celle de la confirmation est sur le point de se conclure et le moins que l’on puisse dire, c’est que le bilan est très mitigé. La faute à qui ? À quoi ? Pourquoi ? Où est donc or ni car ? Je vais essayer de pointer du doigt ce qui a fait que.

Roberto+Martinez+BSC+Young+Boys+v+Everton+l1V0VySyEUol

11 mai 2014, Everton conclue sa saison par une dernière victoire sur le terrain d’Hull City. Les Toffees terminent donc à la 5e place, les supporters fêtent la qualification méritée en Ligue Europa. Les joueurs partent en vacances, certains partent vite pour le Mondial brésilien, d’autres vont le regarder devant la télévision en se goinfrant de pizza quatre fromages.

À l’heure de la reprise, l’effectif n’est pas au complet. Les quelques mondialistes rentrent logiquement un peu plus tard que les autres. Cinq matchs de préparation figurent sur le calendrier. Seulement cinq. Quels clubs vont jouer contre la grosse équipe d’Everton ? Tranmere (D4 anglaise), Leicester, FC Porto, Celta Vigo et Paderborn. Porto mis à part, pas de quoi s’inquiéter, donc. Sauf qu’Everton ne gagne aucune de ces cinq rencontres amicales. La pré-saison se transforme en vanne, et la saison est abordée avec le stricte minimum de confiance. Pas au point physiquement ? La tête encore en vacances ? Toutes les excuses sont plausibles, mais à l’époque, difficile de trouver de vraies raisons à cette entame de saison décevante.

Second point qui a pu poser problème au club de la Mersey : la gestion des transferts. Everton n’a pu conserver Deulofeu, prêté gracieusement par le Barça, un de ses principaux atouts techniques au milieu de terrain. Lukaku est quant à lui retourné dans son club de Chelsea. L’attaquant belge a inscrit 15 buts en 31 matchs de PL, mais Mourinho lui fait plus ou moins comprendre qu’il ne compte pas sur lui pour la saison à venir. Les rumeurs d’un retour définitif de Lukaku à Everton vont vite faire apparition jusqu’à ce 31 juillet 2014 qui voit effectivement le Belge signer un contrat de cinq saisons en faveur des Toffees. Cette arrivée fait largement l’unanimité au sein du club. Le hic ? 38 millions d’euros, le prix de la transaction. L’arrivée sous forme de prêt de Christian Atsu, un autre joueur mis de côté par Mourinho à Chelsea, et de Muhamed Besic, milieu bosnien évoluant en Hongrie quasi inconnu, n’y changeront rien. Everton a tout misé sur le jeune belge.

La saison débute par deux matchs nuls, comme en 2013, ce qui ne laisse rien présager de mauvais pour l’avenir. Everton parvient même à faire signer la star camerounaise Samuel Eto’o, libre de tout contrat, fin août. Tout bénef pour Martinez.

3e journée, Everton reçoit Chelsea et encaisse six buts, ce qui porte déjà son total de buts encaissés à dix en trois rencontres. Certains pointent du doigt l’attaque, d’autres la défense. Difficile d’expliquer quel secteur de jeu est le meilleur, à ce moment-là. Everton sombre rapidement vers la seconde partie de classement, et les supporters comprennent que cette saison sera difficile. Le club s’est finalement peu renforcé, son jeu qui a surpris tant d’équipes est devenu presque prévisible.

Autre problème récurrent qui handicape régulièrement l’effectif d’Everton : les blessures. Les joueurs se croisent à l’infirmerie, le kiné du club, Danny Donachie, décide même de poser sa démission entre les fêtes de fin d’année. L’entraînement est pointé du doigt par ce dernier. Roberto Martinez, qui possède ses diplômes de kiné, ne voit pas de problème à ses entraînements. Ambiance. Pourtant, les blessures musculaires se multiplient, si bien que l’Espagnol est contraint de piocher dans l’effectif prometteur des U21 du club. Beaucoup trop de blessures, c’est un fait indiscutable.

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La défense est un secteur fréquemment pointé du doigt par les supporters et les médias. Les statistiques ne plaident pas en sa faveur, le nombre de buts encaissés se multiplie au fil de la saison. Sylvain Distin, membre indiscutable de la charnière centrale depuis de nombreuses saisons, se blesse et ne retrouve plus son niveau. Fait incontestable : Distin vieillit et, à 37 ans, perd peu à peu sa place au profit de John Stones, jeune très prometteur. Associé à l’expérience de Captain Jagielka, cela peut fonctionner. Sauf que ce dernier n’est pas à son niveau et que Stones passe également par la case infirmerie. Manque de bol, l’effectif n’est pas illimité et des problèmes évidents se posent à Martinez…

Nous pouvons également parler du calendrier, Everton étant à l’heure actuelle (entre les deux matchs vs Kiev) toujours en course en Ligue Europa, malgré ses éliminations prématurées en coupes nationales. Martinez semble logiquement privilégier l’Europe, quitte à galérer en Premier League. L’Everton qui fait le bonheur des supporters en C3 n’est pas le même que celui qui est, au mieux, moyen en PL. J’ai tendance à penser, de plus en plus, à la saison 2012-2013 de Wigan, la dernière sous les ordres de Roberto Martinez. Vainqueur en FA Cup après un parcours fantastique, les Latics ont été relégués en D2 à l’issue de la saison… Les faits sont tristes mais réels : Everton n’est pas trop fort pour jouer en Championship, c’est mathématique, plus que quelques points séparent les Blues de la zone dangereuse.

Préparation médiocre, blessures, des joueurs pas au point physiquement et probablement en manque de confiance, ajoutez-y un calendrier trop chargé et il suffit de constater les dégâts. Quoi qu’il en soit, il reste deux mois à Martinez pour tenter d’inverser la tendance. Une victoire en Ligue Europa, pourquoi pas, sauverait la saison d’Everton, mais il est impératif de ne plus jouer avec le feu en Premier League. Il faut réagir, avant qu’il ne soit trop tard.

@FrenchToffees

#1 The Interview : Opta, au coeur des statistiques

My Premier League lance une nouvelle rubrique nommé « The Interview ». Nous nous efforcerons, comme nous l’avons déjà fait, de proposer des discussions sur des sujets de fond avec des interlocuteurs pertinents. Voici le premier volet de cette nouvelle série…


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2015. L’âge d’or des statistiques. On en voit partout, à toutes les sauces, pour toutes les utilisations imaginables. Le paysage footballistique a connu l’ascension fulgurante des chiffres. Dans le même temps, des sites comme Whoscored, StatsZone, Squawka se sont multipliés et ont pris un poids considérable dans la lecture et l’analyse des rencontres.

Toutefois, ne faudrait-il pas nuancer l’utilisation parfois abusive de ces statistiques ? Se dirige-t-on vers un monde de foot basé essentiellement sur la « data » ?

Pour mieux comprendre cette généralisation des statistiques, nous recevons Rob Bateman, Directeur du Contenu et des Services de Clientèle d’Opta, un des leadeurs mondiaux des fournisseurs de data sportive.

Opta a été crée en 1996. Tu as rejoint l’équipe en 1998. Quel était l’objectif d’Opta à l’époque ? Celui-ci a-t-il évolué aujourd’hui ?

Opta a été fondé en 1996 autour d’un unique produit – le « Carling Opta Index ». L’idée était de collecter de la data et d’attribuer une valeur à chaque évènement – passes, tacles, tirs, arrêts – pour évaluer la performance d’un joueur et créer un classement. Ce classement était distribué aux médias gratuitement. Évidemment, cela allait créer des discordes parmi les fans de football. Toutefois, assez rapidement, il est devenu évident que les gens étaient également intéressés par la « data pure » ainsi nous l’avons distribuée aux médias et aux clubs de Premier League.

(le côté "old" de l'image est assumé par l'auteur)
(le côté « old » de l’image est assumé par l’auteur)

Comment Opta a-t-il développé son immense réseau mondial ?

Le réseau s’est très rapidement agrandi avec le temps. L’histoire a débuté au Royaume-Uni, nous travaillions étroitement avec les médias clients pour leur montrer comment intégrer la data à leur contenu. Ensuite, c’est simple : une fois que vous avez réussi à accrocher un client, d’autres sont intéressés et veulent toujours pousser la barre plus haut. A la base, nous ne collections que la data de la Premier League, puis nous nous sommes étendus aux championnats majeurs d’Europe, soit en ouvrant de nouveaux bureaux soit en rachetant d’autres fournisseurs de data déjà établis. Nous avons également commencé à collecter de la data pour le rugby, le rugby league et le cricket parmi d’autres sports, puis nous avons progressivement atteint les Amériques, l’Extrême Orient et l’Australie. Maintenant nous appartenons à une maison mère si large (Perform Group) que notre réseau s’est étendu aux profils très en vue dans 40 pays différents.

La difficulté a été de convaincre les médias de l’utiliser. Par exemple, le graphique des 5 derniers pénalties tirés par un joueur, affiché juste avant que le joueur tire son pénalty, a été proposé aux diffuseurs il y a plus de 10 ans. A l’époque, ils étaient dubitatifs, ils disaient « nous devons montrer les ralentis ou les joueurs qui entourent l’arbitre ». Cela a pris 5 ans pour que quelqu’un l’essaie, mais une fois que cela avait été fait, nous l’avons montré à tous les autres diffuseurs et il le voulait tous.

Étant donné que nous avons continué d’innover autour de ce type de contenus, cela nous a aidé à devenir un des leadeurs des compagnies de data sportive en faisant plus qu’une simple collecte de données. L’autre point contributif majeur a été la quantité de data que nous collections dans un contexte réel et notre cote favorable par rapport aux autres, ainsi que le marché en lui-même qui devient plus sophistiqué et l’augmentation de la demande pour de nouveaux contenus par les groupes médias.

La data peut être utilisée comme un outil complémentaire, pas pour remplacer les méthodes traditionnelles d’observation.

Même question pour toi : ton rôle a-t-il évolué ? D’ailleurs, pourquoi as-tu choisi de rejoindre Opta ?

Auparavant, je travaillais dans la publicité et le marketing, mais ma passion a toujours été le football. A la fin de ma vingtaine et au début de ma trentaine, j’ai quitté mon travail pour devenir freelance et ainsi pouvoir passer 3 mois par an à engranger de l’expérience dans des groupes tels que Sky. Je voulais essayer de devenir journaliste sportif. J’étais probablement celui avec le plus d’expérience professionnelle ! J’avais déjà écrit pour des fanzines qui essayaient d’utiliser les faits plutôt que les opinions et quand l’offre d’emploi chez Opta a été proposé, j’ai candidaté et j’ai eu la chance d’être engagé. Mon patron à l’époque voulait que l’entreprise se développe rapidement et pensait que mes qualités de management et ma connaissance des différents médias pourraient aller de pair avec mes connaissances et ma passion du football pour favoriser la croissance de l’entreprise.

J’ai accepté une immense baisse de salaire pour rejoindre Opta, mais si on me demandait de mettre sur papier ce que serait mon job idéal, ce serait probablement cela. J’ai la grande chance de pouvoir faire quelque chose que j’adore et j’ai travaillé avec des personnes fantastiques. Même mes « pires » journées sont meilleures que les « meilleures » journées dans mes anciennes expériences professionnelles. En définitive, le pari a été gagnant.

Tu couvres Arsenal sur Twitter sous le pseudo @Orbinho mais tu t’occupes également du contenu international. Pourquoi les statistiques sont-elles si importantes d’une manière générale ?

J’aime beaucoup m’occuper des « faits » d’Arsenal sur Twitter, mais je donne toujours les meilleurs à @OptaJoe que j’ai crée et géré à l’origine. C’est quasiment impossible pour quelqu’un de regarder tous les matchs de tous les championnats, la data peut aider à donner un aperçu global de ce qui se passe, comme les styles de jeu, les forces et faiblesses de l’équipe, les attributs des joueurs. La data sert souvent à appuyer les théories personnelles (comme par exemple qu’Arsenal est faible sur les coups de pieds arrêtés) ou pour détruire les mythes. Si elle est utilisée correctement, elle peut aider les observateurs à mieux comprendre le jeu, ou aider les clubs dans leurs observations. Par exemple, tout le monde sait que Fabregas est un joueur créatif et qu’il a un nombre élevé de passes décisives, mais les données sur les «occasions créées qui ne mènent pas à un but » peuvent mettre en lumière un joueur sous-estimé qui n’a pas beaucoup de passes décisives parce que l’attaquant avec lequel il joue n’a pas converti les occasions. Tout le monde ne peut pas se permettre d’avoir Fabregas, mais on peut utiliser la data pour créer une « shortlist » de joueurs à observer, pour aider les recruteurs à être plus efficaces et peut-être signer un joueur à un bon prix, qui peut aider l’équipe. Les clubs ne peuvent pas regarder tous les matchs. En revanche, s’ils ont la data de tous les joueurs de tous les championnats, cela les aide à repérer de potentielles recrues et envoyer leurs recruteurs. La clé pour comprendre tout cela est la suivante : la data peut être utilisée comme un outil complémentaire, pas pour remplacer les méthodes traditionnelles d’observation.

En réalité, elle [la data] n’a presque jamais une signification unique. On peut utiliser la data pour illustrer les choses, mais il est important de prendre en compte le contexte et de faire preuve de bon sens.

Toutefois, comment peut-on être pertinent avec les stats ? Évidemment, le football n’est pas fait que de chiffres. Comment les assimiler ?

Tout est une question de contexte. Tout le monde à Opta dira que la data ne permet pas d’avoir réponse à tout. Ce qu’elle permet c’est de poser des questions et ensuite, on utilise d’autres ressources – vidéos, nos propres yeux, nos recruteurs – pour appuyer ce que la data nous dit. Encore une fois, si l’on utilise le « nombre d’occasions créées », un joueur aura peut-être un nombre élevé, mais quand un club signe un joueur, il a besoin de savoir quels types d’occasions il crée – combien sur des situations de jeu et combien sur coups de pieds arrêtés. Si Liverpool signait quelqu’un qui était très efficace sur corners et coups-francs, avec Gerrard, ses stats seraient évidemment amoindries. Ou si vous avez un ailier qui centre beaucoup mais vise un grand attaquant comme Andy Carroll, vous n’allez probablement pas l’acheter si vous avez Jermain Defoe devant.

Les gens ont tendance à sur-utiliser les stats, la plupart du temps pour en faire leur argument principal. Cela est-il possible ? Je pense que, globalement, les stats sont parfaites pour illustrer un argument ou donner des exemples. Qu’en penses-tu ?

Bien évidemment, la data peut être mal utilisée. Les gens se focalisent sur un point de data précis et disent « ceci veut dire ceci ». En réalité, elle n’a presque jamais une signification unique. On peut utiliser la data pour illustrer les choses, mais il est important de prendre en compte le contexte et de faire preuve de bon sens. Ceci est un bon résumé d’un incident en particulier :http://www.theguardian.com/football/blog/2015/feb/11/louis-van-gaal-sam-allardyce-long-ball

Penses-tu que la tactique et les statistiques sont compatibles ?

Il y a certainement des connaissances tactiques qui peuvent être apprises par la data. Je me souviens d’un match entre Reading et Arsenal, c’était un lundi soir, Gary Neville disait qu’Arsenal ne centrait pas beaucoup mais que Reading était l’équipe dans tout le championnat la plus susceptible de concéder des buts sur des centres, et utilisait les chiffres (ceux des buts concédés sur des centres par Reading) pour appuyer son raisonnement. En tant qu’arrière latéral, il expliquait l’évolution du jeu et que de son temps, les ailiers étaient attirer vers l’intérieur, alors que maintenant, les latéraux essayent de pousser les joueurs vers la ligne de touche. Il disait cela parce que des équipes comme Arsenal aimaient repiquer dans l’axe pour passer dans l’espace plutôt que de centrer. Il pensait qu’Arsenal aurait fort à gagner à jouer « contre nature » et à essayer de plus centrer. Les Gunners ont marqué 3 buts en première mi-temps, 3 buts sur des centres ! Il avait un sourire très suffisant lors de son analyse à la pause.

Quelle est la partie la plus difficile de ton métier ? La collecte des statistiques ou être pertinent en les utilisant ?

La partie la plus difficile de mon travail est probablement de ne pas avoir un grand contrôle de la manière dont elles sont utilisées. Occasionnellement, elles peuvent être mal utilisées, mais dans ces cas précis, c’est rarement l’auteur de l’article qui est critiqué, mais bel et bien la data qui est remise en cause. Les stats dans le football sont encore dans leur « jeunesse » et pour les fans, elles ont souvent mauvaise réputation.

Il y avait trois fois plus de tirs lors de la Coupe du Monde 1966 que lors de l’édition 2006.

Quels changements majeurs prévois-tu d’ici 10 ou 20 ans ? Penses-tu que les avancées technologiques sont une aubaine ou un « fardeau » ?

Je pense que scruter la data, couvrir les actions sans le ballon deviendra plus commun et cela devrait nous permettre d’expliquer ce qui passe autour du porteur de balle. A l’heure actuelle, elle est seulement utilisée pour mesurer à quelle distance ou à quelle vitesse un joueur court. Mais dans le futur, elle pourrait être utilisée pour montrer la force d’un joueur pour faire une passe ou un tir sous pression parce que nous aurons les informations sur les 22 joueurs au lieu de ne les avoir que quand ils sont en possession de la balle. On trouvera peut-être des éléments que les joueurs porteront pour changer la manière pour collecter et étudier la data. Et bien évidemment, l’accès aux données et la manière dont elles seront utilisées changera. Il y a 10 ans, le « match centre » avec les chiffres totaux basiques ou les alertes buts par SMS étaient des innovations. Il suffit de penser aux différentes applications de représentations graphiques ou les TV tactiles disponibles aujourd’hui, le panorama continuera probablement de s’étendre avec les nouvelles données et les nouvelles façons de les utiliser.

Il y a 50 ans, les statistiques n’avaient pas l’importance qu’elles ont aujourd’hui à cause des limites technologiques évidentes. Pourtant, penses-tu qu’elles auraient été aussi utiles qu’elles le sont aujourd’hui ?

Oui. Le jeu n’a pas autant changé que cela. Ce qui a changé, bien sûr, c’est que les matchs sont disponibles en images vidéos et la technologie pour être capable de collecter la data, nous l’avons. Il n’était possible que d’avoir des choses très basiques il y a 50 ans. Mais nous avons analysé des matchs datant de cette époque, comme l’intégralité de la Coupe du Monde 1966 donc nous pouvons voir l’évolution du jeu. Il y avait trois fois plus de tirs lors de la Coupe du Monde 1966 que lors de l’édition 2006.

Ce qui m’intéresse c’est de voir comment la data peut aider à mieux comprendre le sport […].

Penses-tu qu’Opta soit à son paroxysme ou est-ce que le meilleur est encore à venir ?

Opta a évolué en même temps que le marché s’est développé. Opta a innové et probablement fait plus que quiconque pour aider les médias à intégrer la data dans leurs programmes. Nous espérons continuer notre contribution dans cette avancée avec les nouvelles capacités de collecte de données et de modélisation mathématique qui deviennent plus « mainstream », les clubs et les médias sont toujours à la recherche de contenu pour satisfaire les demandes de leurs lecteurs ou (téle)spectateurs. Ainsi, Opta, en adéquation avec notre maison-mère Perform Group, cherchera toujours à améliorer son offre.

As-tu tendance à voir des chiffres partout dans ta vie quotidienne? Sont-ils devenus une sorte d’obsession ?

J’ai toujours apprécié et utilisé les chiffres, mais je ne dirais pas que je recherche à tout prix à voir des choses numériques partout sans aucun véritable intérêt. Mon obsession est le football et je ne pense pas que cela changera un jour. Ce qui m’intéresse c’est de voir comment la data peut aider à mieux comprendre le sport et j’apprécie énormément échanger cela avec d’autres personnes.

Notre site se focalise sur le football anglais et la Premier League en particulier. Apprécies-tu toujours regarder la Premier League si tu laisses les statistiques de côté ? D’ailleurs, est-ce encore possible pour toi ?

Je dois avouer que je regarde beaucoup moins de football que j’ai pu le faire. Notre travail est tel que nous ne pouvons nous concentrer sur les matchs en tant que divertissement pendant que nous travaillons parce que nous nous focalisons sur des évènements comme les buts, les cartons ou d’autres données et après nous recherchons des éléments pour satisfaire les diffuseurs afin qu’ils puissent les utiliser en direct. On a en quelque sorte le match en fond sonore. En tant que fan d’Arsenal, j’essaie de ne rater aucun match quand je le peux. J’ai tendance à ne pas apprécier un match pour son « spectacle » si je le regarde chez moi. Je suis constamment en train de « penser » data car j’ai accès à différents outils de recherche sur mon ordinateur portable et je partage mon travail avec mes collègues ou d’autres fans. C’est une histoire totalement différente quand je vais aux matchs avec mon fils, je peux me détendre et regarder le spectacle, ses réactions, la foule. Ce n’est pas pour autant que je ne suis pas contrarié quand Arsenal concède encore une fois un but de la tête car je sais qu’ils sont une des pires équipes dans ce domaine !

Pour aller plus loin, je vous invite à lire l’excellent papier des Cahiers du football : http://www.cahiersdufootball.com/article-us-et-abus-de-la-data-5705

Portrait : Elia, la bonne pioche pour Koeman ?

My Premier League donne aujourd’hui la parole à Jean-Baptiste qui tient à vous parler d’Elia et de Southampton. 

Pour les amateurs de Football Mannager le nom Eljero Elia n’est bien évidemment pas inconnu. Le joueur néerlandais fut à la fin des années 2000 synonyme de grand espoir du football européen. Aujourd’hui, à 28 ans (né le 13 février 1987, encore un de cette fameuse génération…) celui qui a été pré-formé par l’Ajax d’Amsterdam avant de terminer son apprentissage au ADO la Haye a vu sa carrière jalonnée d’échecs, plus ou moins retentissants, dans les différents clubs qu’il a traversé.

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Son départ des Pays-Bas et plus précisément de Twente, où il enchaîne deux saisons plus que convaincantes, vers Hambourg, devait coïncider avec l’éclosion d’un véritable ailier virevoltant, dribbleur et accélérateur de jeu.

Ses débuts sont tonitruants, il enchaîne les performances de haute volée. Malheureusement un problème récurent à la cheville va l’éloigner des terrains durant sa première saison. Lors du second exercice sous les couleurs du HSV, Elia critique ouvertement le style de jeu prôné par son entraîneur. Considéré comme un «super sub» plus que comme un titulaire en puissance, les plus grands clubs allemands et européens observent de très près ses qualités balle au pied. Un temps annoncé du coté du Bayern Munich pour palier l’éventuel transfert de Ribery vers la capitale espagnole, Elia décide de plier bagage et d’atterrir chez les Bianconeris à l’été 2011 après deux saisons en Allemagne. Manque de bol, Antonio Conté vient d’arriver à Turin et n’est pas convaincu par le joueur. Avec seulement 5 petits matchs au compteur ( 4 en championnat et 1 en coupe), Elia remporte tout de même son premier titre, le championnat d’Italie. Énormément déçu par le manque de confiance de son coach, il fait machine arrière et retourne au pays de la saucisse et autres bières brunes, blondes et ambrées.

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Sa première saison au Werder Brême, grand rival de son ancien club le HSV, est à l’image de son parcours professionnel et il est régulièrement sorti à l’heure de jeu. Ses qualités footballistiques sont indéniables, mais malheureusement son comportement extra-sportif lui joue des tours. Notamment, nous pouvons citer une sortie mouvementée et tout en excès de vitesse avec son ancien partenaire Marko Arnautovic (Joueur de Stoke City depuis 2013 ). Cette incident le tiendra écarté des entraînements collectifs jusqu’à la fin de saison.

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Elia décide de rester à Brême pour l’exercice 2013-2014, cette saison là, ses statistiques ne correspondent toujours pas aux attentes que l’on a de ce type de joueur (avec 4 buts et 3 passes décisives en 33 apparitions). Jugé sur son rendement trop maigre et ses sorties médiatiques (il répond notamment à un supporter du Werder sur Facebook d’un chaleureux «Go Fuck yourself»), il vient d’être prêté au mercato hivernal à Southampton sous la houlette de Ronald Koeman.

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Ce dernier connait le joueur , il est à la recherche de ce type d’ailier pour compenser le départ de Sadio Mané à la Coupe d’Afrique des Nations. Le profil Eljero Elia est commun chez beaucoup de joueurs pros, c’est une personne qui fonctionne à l ’affectif. Il retrouve chez Koeman le style de jeu de l’Ajax et le fameux 4-3-3 qui lui correspond à merveille. Les résultats sont probants dès sa deuxième titularisation en championnat contre Newcastle, Elia perfore les filets des Magpies à deux reprises. Sa réaction d’après match coïncide parfaitement avec son état d’esprit retrouvé : « Koeman m’a donné la chance de jouer pour Southampton, il était le seul à croire en moi. C’est agréable de ressentir ça de la part de quelqu’un.»

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Positionnement d’Elia sur le terrain depuis son arrivée à Southampton

 

Depuis son arrivée chez les Saints, Elia montre une incroyable envie sur le terrain. Placé sur le flanc gauche de l’attaque, il effectue les efforts défensifs et remporte plus de la moitié de ses duels. Il affiche également un pourcentage de passes réussies très intéressant (76% lors de ses 5 derniers matchs). Il déstabilise les défenses adversaires par ses accélérations balle au pied. Il propose également un jeu en profondeur, inversement à Dusan Tadic sur son aile droite (qui joue plutôt un rôle de meneur de jeu excentré). Ses débordements coté gauche amènent également une multitude de centres afin de servir Graziono Pellè.

 

Les différents centres d’Elia lors du match Swansea - Southampton (23e journée)
Les différents centres d’Elia lors du match Swansea – Southampton (23e journée)

C’est d’ailleurs dans une position similaire, parti coté gauche, et grâce à son appel de balle en profondeur qu’Elia à inscrit son premier but en championnat.

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Les deux derniers matchs sous ses nouvelles couleurs sont poussifs à l’image de son équipe. Elia reste pour l’instant une énigme, et comme c’est souvent le cas, le destin du joueur dépendra de son entraîneur et de ses performances sur le terrain. Bien trop sujet à des excès de tempérament, il reste donc tout à prouver pour cet énième espoir du football. Espérons donc que Koeman puisse porter son joueur au plus haut niveau et pourquoi pas le ramener aux portes de la sélection Orange à la veille du championnat d’Europe 2016.

Sources : Whoscored, Squawka, Dailymail, Skysports, Eurosport.

Qui est l’auteur ? 

Adepte du système et de la philosophie de jeu prônés par Wenger, et malheureusement pour ma santé fan inconditionnel de Diaby, je suis la Premier League avec assiduité me délectant d’un Arsenal – Tottenham tout comme d’un QPR – Crystal Palace.

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